
Des éoliennes s’affrontent autour de l’implantation de moulins à vent dans les zones sensibles de refuge des oiseaux migrateurs
La veille de son quatre centième anniversaire, le Chevalier à la Triste Figure et son inséparable Sancho Pança se trouveraient bien ragaillardis si leurs pérégrinations les menaient en Navarre... Là-bas, perchés sur les crêtes qui entourent Pampelune, des centaines de moulins à vent ( maintenant appelés aérogénérateurs») font tourner leurs hélices comme autant d’étranges avions amputés. Paradoxalement, ce sont les écologistes qui font maintenant office de Don Quichotte virulents car ils ont autant d’arguments pour dénoncer les inconvénients de cette source d’énergie « verte » que n’en ont, de leur côté, les partisans des éoliennes. La polémique est servie !
Un millier d aérogénérateurs
Après l’Allemagne, l’Espagne est le pays qui produit le plus d’énergie éolienne au monde. Les premiers parcs éoliens sont apparus en Espagne il y a peu près dix ans, logiquement dans les zones les plus venteuses (au sud de l’Andalousie), avant investir plus avant dans cette nouveauté. Mais c’est encore en Navarre que le développement de l’énergie éolienne a été le plus dynamique, en dix ans, le territoire navarrais s’est doté de 28 parcs qui cumulent un millier d’aérogénérateurs. Elle est, après la Galice, la seconde région d’Espagne qui produit le plus d’énergie éolienne. D’après les statistiques du gouvernement autonome, 60 % de l’électricité consommée actuellement dans la communauté serait issue des énergies renouvelables, dont 30 % de l’énergie éolienne.
Au départ, le développement des énergies renouvelables en Navarre a coïncidé avec la libéralisation du marché énergétique espagnol quand, dans s années 70, la crise du pétrole obligea le pays à trouver rapidement une alternative à l’or noir, sa principale source d’énergie. À l’époque, la Navarre ne produisait que 15 % de sa propre électricité à partir de combustibles solides (charbon) et donc polluants. Elle devait importer le reste (pétrole) et ses besoins étaient déjà considérables à cause de l’importance du tissu industriel local. Pas question de laisser les usines sans « jus », mais pas question non plus de souiller le bon air des montagnes de noires fumées !
Avec l’entrée de l’Espagne dans le Marché commun, en 1986, la Navarre va faire bon usage des généreuses subventions européennes pour lancer un premier plan énergétique quinquennal (1995-2000) qui a pour but ultime de réduire la consommation de combustibles solides polluants en augmentant la production d’énergies renouvelables. Le premier parc éolien se construit dans la montagne de El Perdôn.
À l’entrée du troisième millénaire, la Navarre avait déjà décuplé la production d’électricité d’origine éolienne. Un article du Wall Street Journal, publié à cette époque, faisait l’éloge de la politique énergétique navarraise, parlant des « vertes collines de Navarre », où les vaches « piquaient un somme à l’ombre des aérogénérateurs », et des stations de transformation électrique « inspirées des maisons de pierre locales ».
Ces mièvreries font bien ricaner les écologistes locaux qui accusent le gouvernement de Navarre de subordonner les véritables enjeux écologistes aux intérêts purement économiques d’entreprises telles qu’EHN (le plus grand groupe de promotion et d’exploitation des énergies renouvelables en Espagne), dont il est justement actionnaire... Le principal grief des écologistes est la mortalité de l’avifaune, causée par les pales des aérogénérateurs.
Source Pyrénées Magazine
Le Pèlerin