Quand l'Algérie était française (4/6)
Certains Pied - Noirs n’aimeront pas….mais la vérité ne leur appartient pas car ceux qui ont fait la vie de l’Algérie n’étaient pas des adeptes de la violence.. L’extrémisme est la dernière des solutions…C’est parce que certains ont choisi cette voie que je suis là comme un damné à parler d’Algérie depuis la France, un pays certes accueillant mais loin de mes racines et de mes habitudes…
On ne se mélange pas.
L'agriculture est reine jusqu'à la veille de la Première Guerre mondiale. Les Européens ont irrigué, asséché les marais, construit des barrages, mais aussi des ponts, des écoles et des hôpitaux (voir page 82). Mais la majorité des terres est devenue la propriété d'une minorité de grands colons. Il y en a qui sont là depuis le début de la conquête mais sont arrivés capitaux en mains et recommandations de ministres en poche, comme les Lavie et les Borgeaud, familles d'origine alsacienne et suisse. Ils ont constitué de gigantesques domaines et tiennent solidement le pays. Sous Louis-Philippe et Napoléon III, de grandes sociétés financières ont également investi en Algérie et leurs représentants forment un redoutable lobby. En 1930, 20 % des Européens détiennent 74 % du domaine agricole appartenant aux Français. Mais la majorité des Européens travaillent dur pour des salaires inférieurs à ceux de métropole. « A lire une certaine presse, il semblerait vraiment que l'Algérie soit peuplée d'un million de colons à cravache et à cigare, montés sur Cadillac », ironise ainsi Albert Camus en 1955. Mais, si pauvres soient-ils, ils détiennent eux aussi le pouvoir. Car les musulmans n'auront jamais les mêmes droits que les Français.
A l'arrivée du corps expéditionnaire du général de Bourmont, ils étaient 3 millions. La spoliation de leurs terres a été la règle pour permettre aux colons de s'implanter. Les musulmans avaient ainsi perdu, en 1919, 7,5 millions d'hectares. Depuis 1881, un Code de l'indigénat organise les dispositions répressives qui leur sont applicables. L'indigène ne vote pas, ne peut entrer dans la fonction publique qu'en renonçant à la religion musulmane, ne touche pas la même solde quand il est soldat. En revanche, les musulmans ont les mêmes devoirs que les Européens. Durant la Grande Guerre, 25 000 d'entre eux mourront aux côtés de 22 000 pieds-noirs. Certes, il restera une aristocratie indigène qui fait cause commune avec les Français. Ainsi, au début de la guerre d'Algérie, en 1954, 600 propriétaires musulmans possèdent chacun plus de 500 hectares. Mais la colonisation a aussi entraîné le déplacement de millions d'entre eux qui ne possèdent plus que des terres à très faible rendement. Les rapports entre musulmans et Européens ? On cohabite mais on ne se mélange pas. La peur est toujours là, prégnante. Camus évoque ainsi ce « danger permanent » qu'il ressent quand sa tante « passait au moment du coucher voir si on avait bien tiré les énormes verrous sur les volets de bois pleins et épais » et « ce peuple attirant et inquiétant, proche et séparé, qu'on côtoyait au long des journées, et parfois l'amitié naissait, ou la camaraderie, et, le soir venu, ils se retiraient pourtant dans leurs maisons inconnues, où l'on ne pénétrait jamais, barricadés aussi avec leurs femmes ».
A suivre
Dossier réalisé par François Malye
http://www.lepoint.fr/actualites-mon...e/924/0/247240
Le Pèlerin