Notamment par les éditeurs nationaux et étrangers qui, à cette occasion, s’activent et mettent les bouchées doubles pour être au rendez-vous. Car le Salon reste un espace où on vend des livres directement (autrement dit une foire), sans passer par le libraire ou tout autre intermédiaire. En terme de «marché», le Sila est tout bénéfice pour les éditeurs qui, en la circonstance, boostent leurs ventes et oublient pour un moment le temps des vaches maigres et les problèmes que continue de rencontrer leur secteur. Sans compter qu’ils ont l’opportunité d’être en contact direct avec le public et d’évoluer dans un espace d’échange (avec le lectorat, les auteurs, les confrères). C’est probablement ce double aspect commercial et symbolique qui a fait du Sila un Salon très couru par les éditeurs nationaux et internationaux (notamment arabes). Pendant quelques jours, les éditeurs algériens ont donc cette chance inespérée de fructifier leurs affaires, de faire connaître leur travail tout en découvrant celui des autres... Le temps que vivent les roses. Mais, après ? Après les dix jours bénis de promotion du livre et de la lecture, pendant lesquels le livre revient à la vie grâce au Sila, l'euphorie des uns et des autres commencera à s’estomper au bout de quelques semaines. Forcément, la machine éditoriale ne pourra plus carburer à l’essence sans plomb mais au gasoil. Le Sila ne sera plus l’arbre qui cache la forêt. Inévitablement, il y aura le retour à l’éternelle question : quelle est la place du livre en Algérie ? Un débat encore et toujours d’actualité, surtout que les multimédias font au livre une concurrence de plus en plus féroce, dans une société à forte tradition orale. Certes, les maisons d’édition privées se sont multipliées ces dernières années, alors qu’elles n’étaient même pas une dizaine à l’époque où la Sned avait le monopole de la publication. Depuis 2007, avec l’année de la culture arabe, l’édition a repris du souffle et continue à se déployer, il y a un foisonnement d’ouvrages publiés. Les pouvoirs publics ont beaucoup encouragé pareil redéploiement, notamment à travers la structuration de la profession d’éditeur, les mesures relatives à la baisse des taxes sur le papier, le soutien à la création et à l’édition, le Fonds d’aide au développement et à la création littéraire et artistique créé en 1999. Autre mesure d’encouragement : l’aide fournie aux éditeurs algériens qui participent à des Salons internationaux, l’acheminement des livres étant à la charge du ministère de la Culture (ceci dans le cadre de la promotion du livre algérien à l’étranger). En mai 2009, il a même été créé, par décret présidentiel, un Centre national du livre (mais cette institution n'a toujours pas vu le jour). Malheureusement, il manque toujours une vraie politique du livre, avec des lois claires régissant l’édition qui, aujourd'hui encore, reste fragilisée. A cela, il faut ajouter que, parmi les intervenants de la chaîne du livre, le métier de libraire ne fait pas vivre son homme. Pire, le nombre de librairies répondant aux normes n’atteint même pas la vingtaine. Quant à la distribution, le réseau est tellement rudimentaire que le diffusion du livre est considérée comme le parent pauvre de la chaîne du livre en Algérie. Et que dire, enfin, du problème de la traduction qui reste très coûteuse pour les éditeurs ? On n’est pas sorti de l’auberge, d’autant plus que, cette année, on est revenu à la gestion exclusivement étatique du Sila (par le biais d’une filiale de l’Enag). Mais ne gâchons surtout pas leur plaisir aux éditeurs qui courent ce Salon, très prisé également par les prestataires de service qui en ont fait un vrai business.
Source Le Soir d’Algérie Hocine T.