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  • : Algérie Pyrénées - de Toulouse à Tamanrasset
  • : L'Algérie où je suis né, le jour du débarquement des Américains, le 8 novembre 1942, je ne l'oublierai jamais. J'ai quitté ce pays en 1962 pour n'y retourner que 42 ans plus tard. Midi-Pyrénées m'a accueilli; j'ai mis du temps pour m'en imprégner...mais j'adore
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De Toulouse à Tamanrasset

 

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Le cirque de Gavarnie

L'Algérie, j'y suis né le jour du débarquement des Américains, le 8 novembre 1942. J'ai quitté ce pays merveilleux en 1962, pour n'y retourner qu'en août 2004, soit 42 ans plus tard...
Midi-Pyrénées m'a accueilli. J'ai mis du temps pour m'imprégner de Toulouse mais j'ai de suite été charmé par ce massif montagneux et ses rivières vagabondes que je parcours avec amour...Ah ces chères Pyrénées, que je m'y trouve bien ...! Vous y trouverez de nombreux articles dédiés à cette magnifique région et la capitale de Midi Pyrénées : Toulouse
L'Algérie, j'y suis revenu dix fois depuis; j'ai apprécié la chaleur de l'accueil, un accueil inégalé de par le monde.......L'espérance d'abord ...Une relative désillusion ensuite...Pourquoi alors que le pays a un potentiel énorme...Les gens sont perdus et ne savent pus que faire....Les jeunes n'en parlons pas, ils ne trouvent leur salut que dans la fuite....Est-il bon de dénoncer cela? Ce n'est pas en se taisant que les choses avanceront.
Il y a un décalage énorme entre la pensée du peuple et des amis que je rencontre régulièrement et les propos tenus dans les divers forums qui reprennent généralement les milieux lobbyistes relayant les consignes gouvernementales...
Les piliers de l'Algérie, à savoir, armée, religion et tenants du pouvoir sont un frein au développement de l'Algérie ....Le Pays est en veilleuse....Les gens reçoivent des ….sucettes...Juste le nécessaire... pour que ....rien nez bouge....
Pourtant des individus valeureux il y en a ....Mais pourquoi garder des élites qui pourraient remettre en cause une situation permettant aux tenants des institutions de profiter des immenses ressources de l'Algérie. Le peuple devenu passif n'a plus qu'un seul espoir : Dieu envers qui il se retourne de plus en plus...Dieu et la famille, cette famille qui revêt une importance capitale en Algérie.

Le vent de la réforme n'est pas passé en Algérie tant les citoyens sont sclérosés dans les habitudes et les traditions relevant des siècles passés....La réforme voire la révolution passera....à l'heure d'Internet, on ne peut bâillonner le peuple indéfiniment...Cela prendra du temps mais cela se ferra...
Pour le moment le tiens à saluer tous les amis que j'ai en Algérie et Dieu sait que j'en ai....C'est pour eux que j'écris ces blogs, quand bien même je choisis souvent mes articles dans la presse algérienne....pour ne pas froisser la susceptibilité à fleur de peau de l'Algérien...

Cordialement,
Le Pèlerin

 

 

 

 

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25 septembre 2010 6 25 /09 /septembre /2010 10:04

Paris s’emmêle les pinceaux au Sahel

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La France a exprimé officiellement sa volonté de négocier avec les terroristes tout en sollicitant l’aide d’Alger et des Américains: un véritable charivari.

Une cacophonie règne apparemment au Quai d’Orsay dans la gestion de l’affaire des otages au Niger. Plus d’une semaine après l’enlèvement des sept étrangers au nord du Niger, la France, d’où sont originaires cinq victimes, a officiellement exprimé son désir de négocier avec Al Qaîda.
Paris a confirmé hier, son entier engagement à lier des contacts avec les ravisseurs, c’est-à-dire Al Qaîda. Et pour l’heure, la France qui a été informée d’un autre rapt au Nigéria, mardi dernier, n’envisage aucune intervention militaire. Elle s’est contentée de dépêcher une centaine de militaires dans le Sahel, alors que d’autres militaires français sont arrivés au Burkina Faso pour une formation antiterroriste. «Nous avons des militaires français qui sont arrivés dans le cadre d’une mission (...) de formation de nos éléments pour la lutte contre le terrorisme.» a indiqué cet officier à l’AFP sous couvert d’anonymat. Pour nuancer cette volonté clairement affichée par la France de négocier avec les terroristes, le ministre de la Défense français souligne que «nous ne sommes absolument pas prêts à leur céder en toutes circonstances, et que le paiement de la rançon n’est pas une stratégie durable». ¨Parallèlement à cette démarche en faveur des négociations, la France n’hésite pas de solliciter les compétences de l’Algérie, et demande même aide aux Américains. Aujourd’hui, Paris a mis de côté toutes ses divergences avec Alger et donne la priorité aux intérêts et liens communs afin de mettre en pratique un consensus de lutte contre la nébuleuse dans la zone du Sahel. Dans ce contexte, le ministre français de la Défense, Hervé Morin a déclaré: «Nous avons une coopération en matière de renseignement avec nos amis algériens qui sont extrêmement mobilisés dans la lutte antiterroriste.»
En fait, par cette déclaration rapportée par l’AFP, le ministre français tient à soutenir que la France considère l’Algérie comme un acteur incontournable dans la lutte contre le terrorisme. Ayant mené cette lutte depuis presque vingt ans, l’Algérie a acquis une expérience incontestable. Ainsi, pour dire que les tensions entre Alger et Paris ont pris fin et les relations bilatérales ont connu la stabilité.

Le beau-frère de Mokhtar Benmokhtar assassiné

Des sources sécuritaires crédibles ont rapporté qu’un groupe terroriste affilié à Al Qaîda au Maghreb islamique a assassiné - en territoire malien- le beau-frère de l’émir du Gspc Mokhtar Benmokhtar (MBM). Les mêmes sources précisent que cet assassinat a été perpétré sous les ordres de Abd Alhamid Abou Zeid, l’émir qui dirige la frange de la branche la plus radicale d’Aqmi. Son groupe est le seul à avoir exécuté un otage, le Britannique Edwin Dyer, en juin 2009 et responsable de la mort en juillet de l’otage français Michel Germaneau. Un responsable à la Fondation pour la recherche stratégique, Jean-François Daguzan à souligné à l’AFP: «L’Algérie est un acteur fondamental. Son atout c’est d’avoir Al Qaîda chez elle. Dans la région, c’est le pays le plus puissant, le plus riche et le plus grand.» Pour sa part, Kader Abderrahim de l’Institut des relations internationales et stratégiques confirme: «Le régime algérien a longtemps infiltré ces groupes, il a les moyens d’agir, l’envergure diplomatique et l’expérience militaire.»
L’Algérie qui, soudainement, est placée au-devant de la scène en quelques heures, se voit défendre son rôle sur la question des Touareg par un certain M.Poniatowski cité par l’AFP comme étant un chercheur, qui souligne: «Les Algériens n’ont pas attendu les enlèvements dans le Sahel pour agir sur leur flanc sud, Alger avait été un intermédiaire important sur la question des Touareg.» Une collaboration pour le moment indispensable pour sauver la vie des otages. Il est à souligner que jeudi dernier un nouveau Conseil de défense et de sécurité restreint s’est réuni au lendemain de l’enlèvement de trois Français dans le golfe de Guinée et une semaine après le rapt opéré au Niger contre également des Français.
Aucune information n’a filtré sur ce qui a été dit et décidé. La situation au niveau de la zone du Sahel demeure préoccupante, un agent des services de sécurité français se trouve parmi les otages, nous avaient confié des sources très au fait du dossier du Sahel, les Américains sollicités par la France pourraient intervenir de façon directe ou indirecte et dans tout ça Al Qaîda qui demeure, du moins pour l’instant, en position de force, a mis en garde le Quai d’Orsay contre toute tentative d’intervention militaire. Le rapt, pour rappel, a été orchestré au nord du Niger par le tristement célèbre Abou Zeïd avec la complicité d’Ag Amnoukal, un Touareg d’origine malienne et un chef contrebandier nigérien qui répond au nom de Mohamed Iblègh. La France est à la recherche aussi de trois autres ressortissants enlevés au Nigéria. En Afghanistan, le même pays cherche à libérer deux Français détenus par des taliban. La lutte antiterroriste pour la France s’impose sur plusieurs fronts et la fin n’est pas pour demain.

Source l’Expression Ikram Ghioua

Le Pèlerin 

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11 septembre 2010 6 11 /09 /septembre /2010 23:25

La liberté de pensée

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C’est le titre d’une célèbre chanson de Florent Pagny, c’est aussi le titre d’un traité philosophique de Voltaire en 1760, mais en ce qui me concerne, je la situe dans le contexte universitaire dans lequel j’évolue.

Pascal nous dit que la pensée fait la grandeur de l’homme, car elle lui permet de se représenter ce qu’il est, de se représenter le réel par concepts. Conjuguée à la liberté, elle repousse les limites de notre cerveau à produire de l’intellect. Le processus de mondialisation qui accélère les changements économiques et sociaux devrait s’accompagner de celui du renouvellement des ressources intellectuelles puisées dans les gisements naturels des laboratoires de recherche, des vagues successives de diplômés universitaires, des nouvelles idées qui émanent de débats contradictoires à travers les associations apolitiques et civiles, des découvertes scientifiques et technologiques qui ont un impact réel et positif sur le bien-être de la population. La formation de l’esprit critique doit commencer dès le plus jeune âge, cependant, le but de mon article est de montrer que ce n’est malheureusement pas dans ce sens que l’on le dirige.

Subordonner l’aspect scientifique aux contraintes et procédures administratives caractérisées par la rigidité, la lourdeur bureaucratique, l’arbitraire (parfois) et le manque d’ouverture spirituelle est de nature à briser les élans et les velléités progressistes et prospectives. Il est difficile d’imaginer l’avenir de l’université si la gestion, telle que conçue par certains, laisse peu de latitude aux sous-responsables qui peuvent être évincés plus pour des raisons d’indocilité que d’incompétence, si on n’arrive pas à dissocier le phénomène de valorisation de la recherche de celui des méthodes et balises qui y conduisent, si ceux qui ont à cœur de nous faire sortir de cette inertie n’ont pas droit (ou plutôt voix) au chapitre, et si le flou persiste pour savoir qui est au service de quoi. Dans les pays communistes, les intellectuels sont poursuivis pour leurs opinions bourgeoises dès qu’elles s’écartent de la doctrine du parti et de la propagande officielle, la liberté de penser est réduite par la censure du pouvoir en Iran où la presse est soigneusement muselée. Les pays préfèrent rechercher le profit à court terme en culminant les compétences utiles et rapides à fabriquer, ils renoncent imprudemment à l’investissement à long terme qu’est celui de la formation de base et de la curiosité scientifique nourrie par la capacité d’exercer « librement » son esprit critique, de pouvoir comparer avant de choisir sur la base de critères viables.

Ne pas sortir des sentiers battus semble être le maître mot que cela soit au niveau pédagogique, scientifique ou managérial. En effet, l’université demeurée au fil des siècles parmi les rares endroits à l’abri des expressions de force, un lieu où des discours qui professent paradoxalement l’ouverture, est en train de glisser vers un mode à la caserne, où le chef, le professeur, l’agent… ont toujours raison, vers une mise au pas (à l’instar de celle de la société) qui fait craindre des lendemains peu reluisants. Les outils aussi bien que les démarches sont de plus en plus imposés, et par conséquent de plus en plus contestés (les protestations font tache d’huile), réduisant la liberté de pensée, et par ricochet, celle d’agir aux plus simples expressions. Privant les jeunes cadres de réaliser des projets novateurs, marginalisant les compétences qui se dressent en opposition, ce dirigisme fatal est en contradiction avec l’ouverture du savoir et l’objectif de produire des citoyens démocrates ; sans conviction, l’aspect exécutoire prime sur le rationnel. Ce système, une fois mis en place, est autoréplicatif, il se reproduit telle une épidémie à tous les niveaux.

L’étudiant se voit disposer d’une série de faits sans avoir la perspicacité de juger, on assiste à des cours magistraux ternes qui n’intéressent plus, on n’y assiste qu’occasionnellement, où les paradoxes peuvent passer sans soulever le moindre étonnement, sans feed-back, sans participation active, et sans questions-réponses. Ceux qui s’aventurent à comprendre ou s’expriment correctement en français sont tels des extraterrestres, taxés de phénomènes étranges, pointés du doigt s’ils ne sont pas carrément écartés. Par leur soif de percer les mystères de la nature, ils dérangent la quiétude des gardiens du temple du conservatisme nationalo-linguistique. Au niveau pédagogique, l’étudiant, une fois ses modules acquis et par la rareté des explorations académiques hors période de travail (avez-vous vu un jeune bouquiner pendant les vacances ?), il a déjà tout oublié ; à la prochaine rentrée universitaire, il aura entre temps « formaté » son cerveau et suivi une cure d’apprentissage à l’envers. Il n’y a pas de mécanisme de construction des connaissances et d’apprentissage qui facilite leur assimilation par couches, ni leur mémorisation à long terme. Le gestionnaire tétanisé se doit d’appliquer à la lettre les instructions venant d’en haut, et l’enseignant, apeuré par un excès de prudence dans l’exercice de ses pensées, est astreint d’appliquer un contenu peu adapté pour ne pas dire caduque dont il n’est pas imprégné et dont il ne fait souvent pas l’effort d’actualiser.

Les copies, les travaux pratiques, les langages de programmation doivent être conformes à ce que veut l’enseignant. Le contenu des programmes a sacrifié les aspects qui stimulaient l’esprit critique au profit de ce qui aide à avoir des bonnes notes, c’est-à-dire des modèles façonnés et des prototypes prêts à l’emploi, et les sujets d’examen deviennent impossibles à traiter dès que les exercices ne sont pas des reproductions - où on a pris le soin de changer les données - des fiches de travaux dirigés. L’absence cruelle d’imagination commence à l’école par la rédaction ou bien l’expression écrite qui est souvent une simple réorganisation des phrases dans le bon ordre. Dans un marasme durable, tout est objet finalement ; pour tout un chacun et parce qu’on lui dit qu’il n’a pas la maturité pour le faire, il se trouve que l’on a décidé pour lui, réfléchi à sa place et résolu son problème sans considération de cette dimension humaine qui fait la différence pour qualifier ses porteurs d’intelligents. Le résultat est désolant : au lieu d’apprendre à convaincre, nous avons appris à être convaincus ! Nos capés, au contact des autres civilisations, ont du mal à avouer leur ignorance, ou pire encore, s’exprimer correctement dans une langue.

L’étudiant algérien (ce n’était pas le cas il y a quelques années) parti poursuivre ses études à l’étranger, a-t-il les prédispositions nécessaires lorsqu’il se retrouve pantois dans un système impitoyable ayant peu de choses communes avec celui qui l’a formé ? Dépourvu de l’essentiel, c’est-à-dire du sens de l’analyse et celui des responsabilités, il aura tardivement et à ses dépens, à travers la vacuité de ses connaissances pratiques et l’impuissance de son argumentation, compris que réussir n’est pas seulement avoir un diplôme. Cette déficience l’empêche ici en Algérie d’intégrer facilement le milieu professionnel pour lequel il est destiné. Avoir un diplôme - prenez l’exemple du bac cette année - ne lui aura pas servi à grand-chose, pas même à avoir un niveau intellectuel correct, quant aux entreprises, elles éprouvent le manque d’initiatives de ses managers comme un sérieux handicap.

Mon père, n’ayant même pas réussi sa sixième du temps de la France, savait quand même rédiger une lettre. Je revois son image des heures durant, plongé dans son journal avec ses grosses lunettes de presbyte, manifestant de temps à autre des signes de désolation. En lisant une de mes étudiantes un jour, les fautes de français qui ont bourré sa copie donnaient à sourire. Le fou rire passé, je me suis dit que ce n’est pas de sa faute ; enfin pas toute à fait. Est-ce la fierté du système éducatif de nous fournir des bacheliers en quantité ne sachant pas trop quoi en faire ? Comment avec des élèves ayant poireauté des mois aux portes des lycées, une dernière place dans les olympiades des mathématiques, et des librairies transformées en pizzerias (le dernier exemple est celui de l’espace Noûn à Alger), interpréter et être fier de ce chiffre de 61% de réussite au bac ? (la rumeur circule déjà que l’an prochain, il sera encore meilleur). Je viens de lire que pour accéder en pharmacie, il faut avoir 15.94 de moyenne, j’ai alors imaginé un amphi plein à craquer de mention « très bien ». C’est très bien, diriez-vous, une situation que nous envierait n’importe quelle université étrangère ! Quelle aubaine pour les profs de pharmacie ! Par quel miracle s’est réveillé le génie qui est en nous ? Les parents ne sont pas dupes, il n’y a pas de quoi s’enorgueillir, ils savent que ce satisfecit est un leurre et qu’on ne fait que retarder l’échéance fatidique. Arrêtons de nous voiler la face !

Comment dans un système où la fraude tente à s’institutionnaliser, où un accès aux formations spécialisées (genre post-graduations) arrive à contourner sans scrupules l’égalité des chances, pouvoir assurer une intégrité et une crédibilité d’un diplôme ? Heureusement, il se trouve toujours quelques brillants étudiants qui s’accrochent aussi bien ici qu’à l’étranger, grâce également au milieu familial duquel ils sont issus, et qui a su préserver leur attachement à la modernité. C’est d’ailleurs pour ce noyau d’étudiants dont la vigilance objectera toujours aux pratiques qui nous font reculer qu’on a plaisir à travailler. Même les productions scientifiques ne sont pas épargnées. Censées apporter du sang neuf dans les perspectives et les retombées de la recherche, elles sont souvent redondantes et peuvent échapper à la logique ou à la rigueur scientifique. En quantité au détriment de la qualité, objets de business, écrites souvent dans le but de soutenir une thèse, elles ne collent pas avec les préoccupations majeures des entreprises économiques, ou les aspirations réelles de la société. Elles ne sont plus l’aboutissement du travail de recherche, elles en deviennent le but. Pourtant dans l’histoire des sciences, beaucoup d’exemples montrent que c’est en réfutant les thèses et les préjugés du moment fussent-ils écrits par les maîtres, que les grandes découvertes ont eu lieu ; ennemis de l’imprimature, les scientifiques refusaient d’admettre une vérité comme étant définitivement absolue. « Ce n’est pas en cherchant à améliorer la bougie qu’on a inventé l’ampoule électrique », écrit E. Brezin. A l’image de la société où la peur et la résignation ont déjà neutralisé la mobilisation citoyenne et syndicale, la disparition de cet esprit « socratique » ayant presque été constatée à toutes les échelles de la formation, l’université plus que jamais fragilisée dans sa vocation universaliste ne récolte que le produit du système.

Elle laisse ainsi la place à la médiocrité qui ne se fait pas prier pour s’installer car elle suggère désormais l’étouffement des voix discordantes, la place à un immobilisme routinier qui plombe le quotidien et bloque l’horloge du développement. Le divorce entre savoir et culture est patent, il ne faut pas s’attendre - sauf si un sursaut révolutionnaire changera notre mode de perception et nos mentalités - à l’émergence d’une génération mue par la volonté d’innover et capable d’accepter la diversité ou discuter les opinions d’autrui. Cloîtrés (dans le sens hermétiques), habitués à la fainéantise et assommés par la langue de bois, - néanmoins bien perméables aux idées noires ou d’un autre âge -, arrivera un jour où nous renoncerons de penser librement même si la démocratie nous sera offerte ! La période du terrorisme nous a suffisamment indiqué pourquoi il est si facile de manier les esprits crédules pour en faire des machines à tuer. Les populations ont dû subir le diktat des émirs autoproclamés. Niant simplement la valeur de la vie, des centaines (ou des milliers) d’adolescents étaient prêts à l’endoctrinement car n’ayant pas cette aptitude de discernement entre le bien et le mal, stigmatisant les effets et les produits du modernisme comme une matérialisation satanique. Afin d’étayer mes propos, voici un extrait typique d’un écrivain contemporain : « Le reste du monde peut faire de la science, et nous musulmans pouvant la découvrir de nouveau dans le Coran ». Au lieu de nous démontrer que les visions modernistes résonnent harmonieusement avec les crédos islamistes d’une approche réformiste qui nous pousse à travailler, on nous dit que rien ne sert de se creuser les méninges, tout a été prévu.

Sous prétexte parfois qu’il y a risque pour la croyance et pour la stabilité du système à investir les lacunes des connaissances scientifiques, cette léthargie généralisée a tué l’imagination créatrice et figé le moule de la réflexion, ainsi elle affecte la régénération des systèmes de pensée, de raisonnement et de preuve logique. Sans vouloir verser dans l’alarmisme, ceux qui malheureusement règnent en force, ce sont les adeptes de « la nature a horreur du changement ». Pour admettre qu’il est difficile de rompre avec les méthodes du passé, il n’a pas bougé depuis trente ans, pourquoi l’APN est grippée, pourquoi on maintient telle personne à son poste, sur quelle base telle autre est primée, ou alors ce qui se passe pour notre équipe de football, comment sélectionner un sélectionneur ; au lieu d’avoir des objectifs plus ambitieux d’aller de l’avant (celui de marquer des buts), on reste sur la défensive. Après tout cela, on se demande pourquoi le pays, avec toutes ses potentialités, n’avance pas ?

Plus grave encore, la prétendue croyance est une autre chape de plomb, un quitus pour accéder à certains privilèges ; ce prurit de vertu enveloppé dans du wahabisme sectaire est servi pour justifier la non -raison. Ne pouvant s’affranchir d’idéologie sous jacente ni éviter de sombrer dans une démonstration mystique ou fondamentaliste, se sont libérés au contraire tous les effluves du rejet qui nourrit la rancune, l’extrémisme et la haine ; le dogme de la pensée unique continue d’inspirer pas mal de décideurs zélés qui sentent le danger d’une dé-pérennisation. Ne pouvant résister à l’ambiance rentière, les autres qui passent leur temps à graviter autour du système clanique en attendant leur désignation portent la responsabilité de former ou gérer l’élite de la nation. « La science n’est pas un tas de faits, comme une maison n’est pas un tas de briques », disait Poincarré ; elle n’est pas un processus mécanique, elle repose sur des intuitions individuelles et des consensus ensemblistes, ce n’est donc pas fortuit si la pensée créative s’est appliquée d’abord à la pensée scientifique avant de s’étendre au domaine artistique.

Quand j’étais jeune, je jouais au legos, ce jeu danois qui stimule la réorganisation des pièces afin de construire et de donner libre cours à son imagination. A quoi jouent nos enfants aujourd’hui ? Au pistolet, au gendarme, aux jeux vidéo interdits pour leurs scènes de violence, des heures à surfer ou chatter sur internet sans la moindre utilité ou enrichissement des connaissances… tout ce qui peut abêtir les jeunes de notre époque est l’unique moyen de se défouler. Il faut rechercher peut-être parmi les causes des accidents, cette attitude de défouloir sur les routes comme l’effet d’une des frustrations vécues par les nouveaux permis notamment les plus jeunes, assimilés à des permis de tuer. Dénués de cet exercice intellectuel indépendant de toute forme de pression, celui à même de provoquer leur esprit et d’éveiller leur potentialité en matière d’intelligence, combien jouent aux échecs et aux mots croisés ? La ferveur autour des discussions ou réunions enrichissantes avec des personnalités du domaine (verrouillage médiatique aidant) décline de manière inexorable, et la jeunesse laquelle aucun ordre ne pouvait satisfaire, a perdu beaucoup de terrain, elle a perdu cette spontanéité, cette confiance en soi, et ce caractère rebelle qui a toujours fait sa personnalité. Aux rares appels à l’ouverture dans toutes ses formes, le système dans une totale indifférence lui répond par une surdité nonchalante.

Il y a des propositions de supprimer des programmes tout ce qui est jugé « superflu » : c’est-à-dire l’histoire, la géographie, la philosophie, le français,… Le raisonnement est tout simple : « Répétez après moi, répetez… » Puisqu’il s’agit d’apprendre sans comprendre, autant s’en passer. Dans cette logique, on n’a pas besoin de savoir compter puisqu’il y a la calculatrice, nos enfants vont à l’école plus pour nous faire plaisir car l’ingéniosité (ou la qafza) se mesure par la capacité d’user de la fraude pour gravir les échelons ou s’enrichir de manière illicite par des subterfuges qui violent la loi, ils établissent que les normes de la réussite sociale sont presque inversement proportionnels au nombre d’années d’études. Dans un souci d’aller vite en besogne afin d’accroitre le PIB, il faut une élite technologique, avec des connaissances très pointues, des « robots » téléguidés incapables de sortir de la sphère dans laquelle ils ont été conçus. Cela pour dire que le développement ne se résume pas uniquement en l’acquisition et la consommation des produits technologiques, clés en main, s’il nous manque le savoir-vivre, le sens de l’observation, les principes d’éthique, le civisme et le mode d’emploi. De quoi sont faits les cours d’éducation civile ou le contenu des prêches religieux ? Ont-ils une conséquence positive sur l’éducation de nos enfants et nos adultes ?

Axées sur l’enseignement civique et la culture générale en adéquation avec la réalité de l’environnement, au contraire des approches pragmatiques mettent plus l’accent sur l’instruction des relations et la mobilisation des concepts que sur les notions enseignées. Que ce soit en chimie ou dans la théorie des systèmes, les liaisons ont plus de valeur que les composants. Le diamant est fait d’atomes de carbones. La maitrise des liens entre concepts est le seul moyen d’assurer une grande stabilité, d’en intégrer de nouveaux sans faire appel uniquement à la mémoire et au « par-coeurisme » béat. Entre deux étudiants, l’un ayant récité texto sa leçon, et l’autre tenté d’en exprimer le sens, je vous laisse deviner à qui on donne présentement la meilleure note ? « L’imagination est plus importante que les connaissances », dixit A.Einstein. Les priorités de développement évoluant sans cesse, nous avons toujours essayé de les calquer sur les pays européens alors que ni nos besoins ni nos moyens humains et matériels ne sont les mêmes. Cela témoigne du fait que nous avons tendance à tout importer (ou télécharger) : les schémas stéréotypés élaborés ailleurs, les programmes de licence et master, la bureaucratie, l’obscurantisme de certains illuminés véhiculé par des livres subversifs… du bon, du mauvais avec plus de mauvais que de bon.

Des efforts démesurés sont consacrés à cette adaptation (système LMD) de modèles « standards », phénomène de mode oblige, sans une évaluation objective de tous les paramètres, sans y associer tous les acteurs et sans vision à long terme sur le plan socio-économique et des filières sont supprimées sans faire de bilan. Est-ce que nos enseignants, tous paliers confondus sont en mesure d’inculquer aux jeunes générations les bases du véritable progrès ? Avant de le transmettre aux autres, il faut d’abord le discuter, adhérer à ses principes ! Le progrès ne se décrète pas par simple auto satisfaction en dopant les chiffres si choisir n’est qu’une illusion. Les projets louables de promotion de la recherche ne trouveront des échos que si leur finalité devient la quête de qualité, l’exploitation optimale des richesses et vaincre notre isolement scientifique et culturel. A-t-on aujourd’hui, avec tous les moyens qu’on met à la disposition, des laboratoires censés être le vivier de la matière grise, un cadre adéquat et un objectif pour une mentalité de la recherche ? Quel type de chercheur pourrait bâtir l’Algérie de demain si des dispositifs liberticides jalonnent son parcours ? C’est en encourageant en premier lieu le chercheur que l’on saura assoir une politique viable et efficace de la recherche. En somme, orienter le modèle de la pensée qui se retrouve assujettie à un canevas tout dessiné, ou restreindre les déplacements à l’étranger comme vient de le prôner cette nouvelle mesure du ministère constituent des entraves à cette liberté (sujet du thème de cet article) et confortent la thèse d’un autoritarisme gangrénant.

Il ne faut cependant pas confondre liberté et anarchie ; les enseignants sauront faire la part des choses entre une organisation structurée et devant obéir à une charte, et un abus qui s’érige en monopole (même scientifique) et qui va à l’encontre de la mondialisation. Les étudiants sauront faire la distinction entre indiscipline et liberté en respectant les règlements internes et l’avis des autres, différent soit-il. Il est possible, dans la légalité, d’oser bousculer l’ordre établi, de dénoncer sans braver l’interdit, de reconstruire cette solidarité dissoute. Le Coran, loi divine et suprême, utilisé à bon escient, tout en insistant sur le respect de la chose immuable, n’exhorte-t-il pas les croyants à étudier la nature en utilisant un beau privilège spécifique à l’humanité : « la raison » ? C’est par cette même raison, et non en usant de la force qu’il faut convaincre. Contrairement à se réfugier dans le repli et sombrer dans la désuétude, c’est la démarche d’une perpétuelle investigation qui a fait la prospérité des sciences durant l’âge d’or islamique. « Beyt el hikma » ou maison de la sagesse du temps des Abbassides était une sacrée bibliothèque à une époque où les savants étaient estimés à leur juste valeur dans la société. Tout est possible, il suffit de croire au changement afin d’être un de ses artisans. Alors que nous, on veut y retourner, plusieurs pays sont sortis de leur sous-développement grâce à un déclic : « Il ne faut compter que sur soi-même ! ». Le salut c’est d’abord de se donner un but à son existence, et avant de partir le chercher ailleurs, il faut le définir. L’espoir est dans cette jeunesse qui possède cette volonté de relever le défi, j’en suis certain.

Dialogue rompu, et s’étant rendu compte qu’elle n’a rien à attendre d’en « haut », que son avenir a déjà été hypothéqué par une faillite programmée du système économique, endettée jusqu’au cou et malgré elle, elle est obligée rapidement - car le temps qui passe joue en sa défaveur - par une sorte de conscience collective, de se prendre en charge, de se regrouper autour des idéaux républicains, de refuser de se plier aux exigences parce que ceux sont des exigences dictées, de se débarrasser de cette stagnation qui a été longtemps un frein pour son émancipation - en l’occurrence de l’archaïsme et de la négation de l’autre -, de ne plus attendre aux portes de l’histoire mais d’y entrer quitte à le faire sans frapper, de créer des espaces ouverts de communication afin de promouvoir les idées, de chercher à comprendre, d’aller surfer sur les « bons sites » en prenant internet comme plateforme de libre échange intercommunautaire, de zapper sur les « bonnes » émissions TV en écoutant lorsqu’il y a un débat, de ressusciter cet amour pour la lecture que l’école a fait fuir, d’essayer des casses têtes mathématiques et les mots fléchés, de bannir ce copier-coller, de se poser des questions même si on n’a pas encore de réponses, de demander des explications parce qu’il doit y en avoir, d’avoir le courage de dire « non » lorsque tout le monde a dit « oui » (ou le contraire), de redécouvrir que le véritable patriotisme n’est pas seulement de saluer l’hymne ou le drapeau national, de réapprendre les ABC de la démocratie et surtout se sentir libre à développer ses pensées.

(*)Source El Watan Haffaf Hafid

Professeur en informatique. Université d’Oran

Le Pèlerin

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9 septembre 2010 4 09 /09 /septembre /2010 23:29

La crise du Sahel : Essai d’analyse

afrique_sahel.jpg

L’espace sahélien a dans le passé été un axe stratégique pour les caravanes qui se déplaçaient entre la mer rouge et l’océan atlantique.  Cet axe disposait de pénétrantes qui le reliaient aussi bien aux pays du Maghreb qu’aux pays de l’Afrique de l’Ouest.  Donc contrairement à ce que laissent prétendre certains « nouveaux spécialistes du Sahel », l’espace sahélien n’est pas une zone tampon ni une barrière entre l’Afrique noire et l’Afrique blanche. Il est bel et bien (il a toujours été) un espace de contact et d’échanges entre l’Afrique de l’Est et l’Afrique de l’Ouest d’une part et l’Afrique noire et l’Afrique blanche d’autre part.

Bien qu’inhospitalière, cette partie du monde n’a jamais été quittée des yeux par certaines puissances.

En effet vers la fin des années 1970 – début des années 1980, les puissances occidentales considéraient l’espace qui allait de la mer rouge (Soudan + Corne d’Afrique) jusqu’à l’océan Atlantique (Mauritanie en passant par le Tchad, le Niger, et le Mali) comme un axe stratégique qui pouvait être utilisé par les forces du pacte de Varsovie pour le contrôle de l’accès à la Méditerranée (Europe occidentale).  Ce ci explique en partie la présence militaire occidentale dans certains pays tels le Tchad, le Niger, le Mali, la Mauritanie, le Sénégal et le Maroc.

Dans leur stratégie visant à lutter contre le communisme, les USA ont utilisé l’Arabie Saoudite. Cette dernière  a construit des centres culturels et des mosquées dans la région Sahélo saharienne et a même octroyé des bourses pour la formation des imams en Arabie Saoudite.  Cette démarche arrangea également les dirigeants des pays subsahariens qui voulaient se débarrasser de l’emprise des puissantes confréries dont la Tidjania.

La formation des imams subsahariens en Arabie Saoudite a engendré l’apparition du Wahhabisme dans les pays du Sahel.  Le Wahhabisme est l’islam pratiqué par les salafistes et les djihadistes. Cet islam prône le rejet de toute « bid’â » (innovations jugées contraires au message islamique) et le retour  au Salaf El Salih (les ancêtres éclairés) par une application rigoureuse de la lettre de la chari’â (règles légales de l’Islam). Ce qui se traduit par des préoccupations vestimentaires et par le rejet du « matérialisme occidental ».  L’un des promoteurs de la salafia Abou El Alaë Maoudoudi (1903 – 1979), fondateur indo-pakistanais des « Djamaâtes Islamya », suggère que l’islam doit être imposé à toute l’humanité, la femme doit être recluse et le contrôle des naissances interdit.

Donc l’avènement du wahhabisme au Sahel, l’incapacité des Etats à asseoir leur autorité sur leur territoire (Soudan « guerre civile », Tchad « instabilité du régime et crise du Darfour », Libye « crise avec les voisins », Algérie «crise politique et terrorisme », Niger « rébellion au Nord », Mali « rébellion au Nord » et Mauritanie « instabilité du régime et crise avec les voisins ») et la présence de richesses (sel et or, pétrole, gaz, fer, phosphate, cuivre, étain et uranium ) ont fait que les groupes islamistes terroristes ont trouvé un terrain favorable pour s’y installer.

Il faut signaler ce pendant que ces derniers, agissant sous le label « AQMI » ne représentent qu’une infime partie des forces anarchiques qui règnent dans l’espace « Sahel ».  En effet le trafic d’armes, de drogues, des déchets, des médicaments, des cigarettes et l’immigration clandestine génèrent annuellement un « revenu » de plus de deux milliards de dollars qui sont partagés entre les forces précitées. A cette situation « chaotique», il faut ajouter les ingérences de certaines puissances qui cherchent à s’assurer le contrôle des richesses de cette région (l'or, le pétrole, le gaz, le fer, le phosphate, le cuivre, l’étain et l’uranium).  L’agressivité de certaines puissances étrangères à l’égard de quelques pays de l’espace sahélien dont notamment celle des USA à l’égard du régime soudanais s’inscrit dans le cadre d’une stratégie des occidentaux visant à contrer la poussée géopolitique chinoise en Afrique.

L’AQMI (Al Qaida au Maghreb Islamique) n’est en fin de compte que l’arbre qui cache la forêt. Sa sur médiatisation n’est qu’un coup d’épée dans l’eau ou répond à des desseins qui méritent d’être décryptés. L’envoi des troupes et de matériel high-tech ainsi que les réunions des chefs d’Etats major des armées ne sont que de simples gesticulations car la solution aux problèmes de l’espace sahélien n’est pas militaire. 

Belkacem.dz 

 

Le Pèlerin 


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9 septembre 2010 4 09 /09 /septembre /2010 23:00

Si l’amour était une drogue

 

 

Les poètes ne s’y sont pas trompés et la science le confirme : notre première drogue, la plus naturelle et la plus innée, c’est l’amour, avec son pouvoir bénéfique et ses effets toxiques. Pour le meilleur et pour le pire. Preuves dans "L’amour est une drogue douce… en général" du Pr Michel Raynaud.
La recherche du plaisir
Le Pr Michel Reynaud est chef du département de psychiatrie et d’addictologie à l’hôpital universitaire Paul Brousse. La drogue, c’est sa spécialité. Dans un livre très riche, nourri de son expérience clinique et d’exemples tirés aussi bien de la littérature que de l’expérimentation animale, et écrit avec humour, il nous explique que "L’amour est une drogue douce… en général". "Quand j’entends, jour après jour, des patients dépendants à diverses substances parler de leur jouissance passée, et quand je les vois souffrir du sevrage, je ne peux qu’être frappé par les similitudes qu’ils présentent avec les amoureux en souffrance. On retrouve les mêmes mots, les mêmes symptômes, la même idylle des débuts, époque de la toute-puissance et de la "toute jouissance". Puis le même glissement insidieux vers la dépendance ! Enfin, parce que le produit - ou l’Autre - vient à manquer, à ne plus suffire, ou à détruire, la même souffrance, la même déchéance, les mêmes combats entre la raison et l’envie irrépressible d’y retourner, les mêmes rechutes, le même dégoût de la vie, la même peur du vide…"
Le cheminement est le même : le désir - motivé soit par la recherche de sensations, soit par la quête d’apaisement - débouche sur le plaisir puis sur le manque. "On a longtemps refusé de reconnaître, par manque de données scientifiques mais aussi par souci de ménager la morale, que ce qui rend accro, dans un cas comme dans l’autre, c’est la dimension du plaisir", explique-t-il.
Un puissant stimulant
Il (elle) a les plus beaux yeux du monde, un charme irrésistible, un esprit fou. Avec lui (elle), je plane, je vois la vie en rose, je me sens pousser des ailes… Si l’amour nous stimule et nous met dans un état euphorique, c’est bien sûr grâce à la présence de l’Autre. Mais, n’en déplaise aux romantiques, les neurobiologistes avancent une autre explication. Si l’amour nous "dope", c’est à cause de la dopamine. Une hormone euphorisante dont la production augmente quand on est amoureux et qui active le circuit naturel du plaisir. Plus on en a, plus on en veut. "C’est ce dopage de la mécanique naturelle du plaisir qui, dans l’état amoureux comme dans la toxicomanie, peut rendre accro. Le manque est alors vécu comme insupportable et la passion se transforme en addiction", explique Michel Reynaud. Aux États-Unis, on soigne dans des cliniques spécialisées les "addicts sexuels" en souffrance, tel l’acteur Michael Douglas, selon son propre aveu.
La passion fougueuse est une phase de sur régime et de "dé réalité" qui ne peut pas durer. Elle peut s’achever brutalement, parce que l’un des deux se lasse ou qu’il n’est pas prêt à faire le grand saut dans l’inconnu. Elle laisse alors le souvenir brûlant d’avoir vécu quelque chose d’intense et d’exceptionnel.
Mais elle peut aussi déboucher sur une relation durable. "On peut repérer le point de basculement de la passion vers l’attachement à l’apparition d’un sentiment nouveau : la tendresse. Cette mansuétude dont nous sommes pris pour les défauts de l’autre, ses rides, ses maladresses ou son mauvais caractère ! Entier et aveugle dans la passion, l’amour devient tolérant et clairvoyant dans l’attachement. Plus les années passent, plus nos amours se teintent d’attachement", constate Michel Reynaud
La souffrance du manque
Quand la relation tourne mal, l’amoureux "fou", transi ou éconduit, risque de basculer dans une passion destructrice qui le fait souffrir (patio en latin veut dire je souffre, je subis). Comme le toxicomane, il est devenu esclave, dépendant de l’Autre. Sans lui, il vit en état de manque. Il devient capable de toutes les humiliations pour garder l’être aimé : "Laisse-moi devenir l’ombre de ta main, l’ombre de ton chien…", chante Jacques Brel.
Cette souffrance insupportable peut s’exprimer par une violence dévastatrice. Passion autodestructrice chez Adèle H., l’héroïne du film de Truffaut, fille de Victor Hugo, qui poursuit jusqu’au Canada l’homme qu’elle aime éperdument avant de sombrer dans la folie. Furie meurtrière chez l’héroïne du film Liaison fatale d’Adrian Lyne qui tente de tuer son amant avec un pic à glace. Cela donne froid dans le dos…
Notre spécialiste en addiction se veut toutefois rassurant : "On peut être lié sans être aliéné", assure-t-il. À condition de repérer certains facteurs de risques avant de se lancer dans l’aventure. D’abord, se méfier des obstacles inhérents à la situation (distance géographique, différence culturelle ou sociale, grand écart d’âge, non disponibilité de l’autre, etc.). Ils peuvent exalter le sentiment amoureux (Roméo et Juliette), mais sont aussi précurseurs de souffrances. Ensuite, réfléchir sur soi-même. Si on a connu des souffrances répétées en amour, on y est peut-être pour quelque chose ; autant s’interroger pour ne pas retomber dans les mêmes schémas. Enfin, essayer d’estimer l’Autre avec discernement pour s’assurer qu’il n’est pas un peu plus névrosé que la moyenne…
Tomber amoureux, c’est prendre le risque d’être heureux ou malheureux. Mais est-ce que cela n’en vaut pas la peine ? Écoutons Edith Piaf : "L’amour, ça sert à quoi ? À nous donner de la joie. Avec des larmes aux yeux, c’est triste et merveilleux… Sans amour dans la vie, sans ses joies, ses chagrins, on a vécu pour rien !" Ce serait tout de même dommage…
Notre spécialiste en addiction se veut toutefois rassurant : "On peut être lié sans être aliéné",
Source Seniorplanet
Le Pèlerin

 

       

 

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28 août 2010 6 28 /08 /août /2010 06:00

Appel à contribution financière

Jacqueline Pommert

Jacqueline Pommert responsable de l'Association

Mes chers lecteurs…..

Je me fais l’apôtre de l’Association ATOPIA, dont les activités de brassage culturel correspondent tout à fait à mes aspirations…

Cette association fait énormément d’efforts pour accroitre les liens entre les différents pays ou régions se situant entre Toulouse et Tamanrasset…

Si vous êtes un adepte …

De la paix,

De la justice,

Du développement économique des zones concernées où chacune d’entre elles ne peut qu’y trouver son compte par un accroissement des zones concernées

Si vous êtes un adepte de la libération de la femme et de la Femme du Maghreb en particulier, je vous propose :

1 De consulter les liens ci-dessous précisant les activités de cette association

2 De répondre selon vos ressources à la demande d’aide ainsi faite sous les moyens les plus appropriés.

 memoires

atopia

 

Je cite Jacqueline Pommert, responsable de l’Association :

ATOPIA est une association crée en 2005 pour la promotion des échanges inter-méditerranéens. Nous produisons régulièrement des émissions radiophoniques et des vidéos sur cette thématique dont des extraits sont diffusés sur http://atopia-asso.com et http://www.wat.tv/atopia.

Actuellement, nous produisons une série de portraits de femmes oranaises et de la diaspora oranaise à Toulouse, artistes, créatrices d’entreprise et d’associations, ou militantes et insérées dans la vie politique et, en parallèle, nous effectuons une série de reportages sur diverses structures associatives d’Oran et de Toulouse.  Ces films visent une diffusion grand public en France et en Algérie, assortie de la publication d’un coffret livret DVD et de la création d’un site participatif  « de 31 à 31 ». Nous avons déjà reçu le soutien de :

-      L’ambassade de France en Algérie,

-      La région Midi-Pyrénées,

-      La ville de Toulouse, mission Egalité.

Toutefois ces financements ne suffisent pas et nous sommes à la recherche de 25000€ complémentaires sous toutes formes : mécénat, sponsoring ou pré-souscription au coffret livret DVD.

Alors si  vous pensez aussi que les femmes du Maghreb et les associations sont les éléments moteurs de lutte contre les injustices, de pacification et de développement économique de cet espace inter-méditerranéen, n’hésitez pas  à nous aider.

Contact: Jacqueline Pommert 06 62 85 62 60

Le Pèlerin

 

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10 août 2010 2 10 /08 /août /2010 06:59

Ramadhan en Europe: A chacun sa nuit du doute

lune-ramadan

 

Dans la communauté émigrée, l'approche du mois de Ramadhan pose aussi l'éternelle question de la «nuit du doute». Mais pas comme vous l'imaginez. Comme le comportement de certains «jeûneurs» d'ailleurs.

Les musulmans vivant en Europe ont une autre approche du mois sacré de Ramadhan. D'abord son accueil : le 11 ou le 12 août ? Cela n'a rien à voir avec la «nuit du doute», mais plutôt avec le pays d'origine. Explication : une bonne partie des émigrés commence le jeûne et le termine en même temps que le pays d'origine. Même si les imams des mosquées de Paris, Amsterdam ou Berlin annoncent l'entame du mois de jeûne officiellement pour le lendemain, rien n'y fait, une partie non négligeable des musulmans attend l'appel téléphonique venu du bled pour commencer le jeûne. Fuseaux horaires ou pas, observatoires ou calculs astronomiques, rien ne peut convaincre cette «frange» de jeûneurs à croire que la lune tourne autour de la terre et que cette dernière est ronde et tourne sur elle-même. Passons, le mois de Ramadhan entamé, les habitudes et comportements de bien de catégories prennent des tons et couleurs surréalistes. Normal, diriez-vous. Oui, mais allez-y comprendre ces quelques exemples : il y a ceux qui s'abstiennent de boire boissons alcooliques et autres viandes non certifiées hallal sans s'interdire, en journée, une cigarette, un verre d'eau ou un café. Rien à leur reprocher, sauf qu'ils sont les premiers à juger sévèrement ceux de leurs compatriotes qui n'observent pas le Ramadhan et continuent à vivre comme les autres mois de l'année. Ce qui étonne, c'est qu'ils sont convaincus que le seul fait de s'interdire de boire de l'alcool suffit à rendre leur «Ramadhan» acceptable et renforce leur foi religieuse. Mais il y a plus hallucinant : des jeunes voleurs à la tire se targuent d'arrêter leur «métier» en journée.

D'autres se limitent à subtiliser le porte-monnaie qu'aux «non musulmans». Ce n'est pas de la blague, mais ce genre de comportements (et de croyances) prête souvent à débat le soir, lorsque les jeux et paris sont ouverts dans les nombreux cafés : loto, poker, baccara et l'inévitable belote. Et ceux qui observent, sérieusement, les règles du jeûne ? Ils sont, bien sûr, majoritaires et supportent, courageusement, les nombreuses contraintes de la société occidentale : rythme de travail inchangé, horaires de travail contraignants pour les ouvriers, conducteurs de transports publics, agents de sécurité, etc. Ils se contentent, en attendant de finir leur boulot, d'un café ou d'un sandwich sur le lieu de travail. Ils mangeront chez eux bien plus tard. Au plan familial et «communautaire», Ramadhan réveille les solidarités, la générosité, les rencontres et les réconciliations. Les mosquées sont inondées de dons et offrandes en aliments : dates, laits et laitages, couscous, chorbas, viandes, gâteaux au profit des sans familles, sans-papiers, qu'ils soient musulmans ou non. A titre d'exemple, la Grande mosquée de Bruxelles offre le repas complet tout au long du mois de jeûne. De leur côté, les nombreuses associations civiles multiplient soirées musicales et repas organisés. C'est souvent l'occasion d'appel à la quête pour tel ou tel besoin ou cause. A Bruxelles, Amsterdam ou Berlin, Ramadhan est l'occasion des invitations entre familles et connaissances_ les week-ends. C'est une sorte de tournante des invitations qui s'installe entre famille. En ce mois sacré, il serait injuste de ne pas citer les efforts des communes à forte présence musulmane pour rendre les choses plus agréables aux musulmans.

Horaires hebdomadaires des marchés adaptés ; plan de circulation aménagé ; renforcement de la prévention sécuritaire en zone fortement urbanisée ; courrier aux habitants leur souhaitant un bon mois de Ramadhan, les informant par la même occasion des quelques changements ou aménagements dans la vie de la cité, etc. A l'approche de la rupture du jeûne, la vie dans les quartiers à forte présence musulmane ressemble beaucoup à celle du pays. Des attroupements se forment devant les boulangeries et pâtisseries orientales. Il y a de tout : de la zlabia aux gâteaux et pains traditionnels. Ces rassemblements, sans cohue ni bousculades pour les achats, sont l'occasion de prendre des nouvelles des amis et aussi celles du pays. Vers la fin de Ramadhan, les mêmes questions et attitudes reprennent le dessus : il y a ceux qui fêtent l'aïd au jour fixé par les mosquées et ceux qui s'alignent sur le jour du pays d'origine. Ramadhan est toujours sujet à débat sans fin en Occident comme au pays.

Source Le Quotidien d’Oran M'hammedi Bouzina Med

Le Pèlerin

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2 juillet 2010 5 02 /07 /juillet /2010 05:13

Une planète malade de ses habitants

 la_terre.jpg

 

Malraux, qui était un grand visionnaire, a dit un jour que le XXIe siècle sera spirituel ou ne le sera pas. Mais de quelle planète parlait-il ?

Un simple tour d’horizon, pour peu que l’on rembobine l’histoire depuis ces cinquante dernières années, nous renvoie à la figure, la triste spiritualité que des hommes et des femmes vont chercher ailleurs.

En Occident, des églises sont quasiment désertées et des vocations se tarissent. Les séminaristes se font rares, la messe dominicale fait difficilement le plein et pour attirer les fidèles, certains prêtres, à l’image des évangélistes américains n’hésitent pas à remplacer l’orgue et les requiems religieux par la musique Pop !… Tout le monde chante et bat des mains. Des catholiques qui ont perdu la foi et parfois qui ne l’ont jamais eue, font leurs «emplettes et leur marché» spirituels en Asie.

Au Népal, sur les chemins de Katmandou, en Inde, en Birmanie des milliers d’Européens essayent de se ressourcer chaque année dans les monastères bonzes ou au pied des statues dorées de Bouddha.

Quelques-uns se retrempent dans les eaux froides du Gange à la manière des intouchables dans l’espoir que Brahma ou vishnou les inspire.

Quelque chose apparemment leur échappe dans la vie de tous les jours, quelque chose qu’ils ne maîtrisent pas et qui les dépasse.

Ainsi sur le plan médical par exemple, des touristes vont chercher au fond de l’Afrique profonde, auprès d’un sorcier, à l’ombre d’un baobab la guérison qu’ils ne trouvent pas en Europe ou l’envie de vivre qu’ils ont perdue.

D’autres, sur les recommandations de leur voisin de palier, un camerounais ou un sénégalais, traversent tout le continent pour se faire exorciser ou enlever le mauvais sort jeté contre eux par un ami envieux ou des collègues de travail jaloux.

Alors que toutes les maladies de la planète sont répertoriées et battues en brèche par des remèdes conventionnels tels que les vaccins préventifs ou les sérums curatifs, voilà qu’ils découvrent qu’ils sont loin du compte et que de nouvelles maladies prennent le relais des anciennes telles que le choléra, la tuberculose, la malaria, la rage ou la diphtérie.

Le virus du sida décime des familles entières, les morts se comptent par milliers, par millions. Tout ce qui était permis jusque-là et qui faisait le «charme» de leur existence devient aussitôt suspect, interdit.

Ce maudit VIH arrive pour sonner comme un tocsin et prévenir les hommes et les femmes qu’ils faisaient fausse route sur le chemin de la perversion sexuelle.

Apparemment, l’exemple de Sodome et Gomorrhe détruites dans l’antiquité pour les mêmes travers n’a pas encore totalement convaincu. Mais d’autres surprises, bien plus étonnantes, attendent une planète complètement disjonctée qu’il sera difficile de guérir.

Source Infosoir Imaad Zoheir

Le Pèlerin

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26 juin 2010 6 26 /06 /juin /2010 07:09

France Inter : on ne rira plus radio - L'humoriste Didier Porte et Stéphane Guillon

didier-porte-et-stephane-guillon.jpg

 

Beaucoup de réactions, des auditeurs et des politiques, au licenciement de deux humoristes à France Inter. Les chroniques politiques acerbes de Stéphane Guillon et Didier Porte ont déplu à la direction de la radio de service public. Entre 7 et 9 heures, on ne rira plus.

France Inter sans voix ? C'était hier pour cause de grève, mais pas seulement. Les personnels de la radio se sont dits « sous le choc » de l'annonce des licenciements de Stéphane Guillon et Didier Porte. Mercredi matin, les deux humoristes ont reçu une lettre de licenciement.

Stéphane Guillon et Didier Porte ont été congédiés pour des chroniques qui ont déplu à leur direction. « J'ai essayé de me faire comprendre, de dire ne prenez pas l'antenne en otage pour des intérêts personnels, vous êtes au service du public

[…] . Je crois avoir un certain sens de l'humour. Mais il y a des limites à tout », a indiqué le patron de Radio-France Jean-Luc Hees. C'est lui qui a licencié Stéphane Guillon. Philippe Val, le directeur de Radio France, s'est chargé de congédier Didier Porte. Alors, fini de rigoler ? Le matin sur France Inter, radio de service public, oui : « Je crois qu'on fait un métier entre 7 heures et 9 heures qui est celui d'informer les Français », a répondu Jean-Luc Hees, interrogé sur le maintien ou non du billet d'humour de 7 h 55. Les réactions à ces licenciements sont très vives à l'intérieur de Radio-France, où l'ambiance serait « à couper au couteau », selon des personnels. Le SNJ, syndicat national des journalistes, dénonce « la politique de la terre brûlée de la direction ». Réactions aussi des auditeurs, qui ont écrit, téléphoné à France Inter pour protester. Des politiques, pourtant souvent brocardés par les deux humoristes, ont réagi. Martine Aubry a exprimé la solidarité du PS avec les humoristes « renvoyés brutalement », et défendu « leur droit à la moquerie et à l'outrance ». La leader socialiste avait été la cible d'une chronique de Stéphane Guillon qui l'avait comparée à un « pot à tabac ». L'eurodéputée d'Europe Écologie Eva Joly a dénoncé « les attaques visant les contre-pouvoirs ». Le centriste François Bayrou parle d'une « atteinte à la nécessaire liberté d'expression ». Dans les cercles proches du pouvoir, par contre, c'est le silence… radio. À l'exception de Rama Yade, la secrétaire d'État aux Sports, qui a pris sur RMC la défense de Stéphane Guillon : « Il m'a toujours fait rigoler, même quand il m'épingle ».

«J'ai été cloué au pilori»

L'humoriste Didier Porte, qui a débuté sa carrière de journaliste à la rédaction de La Dépêche du Midi à Agen en 1984, réagit.

De quelle façon avez-vous appris votre licenciement?

J'ai reçu une lettre recommandée une heure avant l'émission Le Fou du Roi mercredi. J'ai été à la fois surpris, et pas surpris. En principe, j'étais maintenu à la rentrée; Stéphane Bern en avait reçu l'assurance. Mais la parole de Philippe Val n'est pas crédible.

Comment réagissez-vous?

Je ne suis pas le premier Français à me faire virer...

Votre chronique sur Villepin et Sarkozy avait suscité de vives réactions...

Cette chronique un peu ratée de Villepin insultant Sarkozy n'était pas du meilleur goût, j'en conviens. Mais cela a pris des dimensions incroyables! J'ai reçu un avertissement. Pendant quinze jours, j'ai été cloué au pilori, j'ai assisté au spectacle des quatre vedettes de la matinale de France Inter commentant la fin de ma chronique, tronquée d'ailleurs. J'ai senti que les réactions étaient démesurées. Ce n'était qu'un prétexte pour me virer. Hees voulait ma tête.

Vous n'avez jamais été tendre pour le pouvoir en place?

Depuis dix ans, je fais des papiers un peu engagés. Je n'ai jamais caché mon anti-sarkozysme virulent.

Votre licenciement et celui de Stéphane Guillon, une décision politique?

Il y a clairement une reprise en main du pouvoir avant la présidentielle. Les gens voient très bien ce qui est en train de se passer. Ils réagissent. Le service auditeurs de France Inter a failli imploser, la boîte mails est saturée de messages de soutien.

Vous entendra-t-on sur d'autres ondes?

Je suis très attaché à France Inter. C'est ma maison. Et je suis incasable ailleurs.

Fini de rigoler, alors, sur France Inter?

France Inter était traditionnellement la radio qui autorisait le plus de transgressions, parfois d'excès. Cet humour politique, incarné, qui ne se dissimule pas derrière une marionnette, ne sera nulle par ailleurs.

Le chiffre : 2

Stéphane Guillon intervenait sur France Inter depuis 2008. On le retrouvera sur Canal plus, dans l'émission «Salut les Terriens» avec Thierry Ardisson.

L'humour et la politique : difficile d'y résister

Guy Bedos l'a rappelé : depuis Aristophane chez les Grecs, les humoristes se sont toujours mêlés de politique. Charlie Chaplin n'a pas demandé la permission d'Hitler pour tourner « Le dictateur ». Pendant la Seconde guerre mondiale, le général de Gaulle n'a pas mis à pied Pierre Dac pour ses chroniques sur Radio Londres.

Il reste que l'humour, sur le service public, passe difficilement la rampe. Dans les années 1970, les Shadoks divisent la France en deux. Une décennie plus tard, c'est Pierre Desproges qui donne de l'urticaire. À propos de la « Minute nécessaire de Monsieur Cyclopède », l'humoriste décrivait ainsi la polémique : « La France est divisée entre les imbéciles qui aiment, et les imbéciles qui n'aiment pas ».

Que dire de Coluche, dont l'humour dévastateur, populaire, inquiétait les politiques ? : « Les z'om politiques, disait-il, cinq ans de droit, et tout le reste de travers ». Renvoyé de RMC pour ses insolences à l'égard de la famille princière de Monaco, Coluche fut aussi écarté du service public lorsqu'il décida de se présenter à la présidentielle de 1981. « Jusqu'à présent, la France était coupée en deux. Avec moi, elle sera pliée en quatre ! »

En 2007, c'est Laurent Ruquier sur France 2 qui fait les frais de la difficile cohabitation de l'humour et de la politique sur le service public.

Source La Dépêche du Midi

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13 juin 2010 7 13 /06 /juin /2010 23:44
Michel Rocard : "La télé, c'est la mort de la démocratie"

Lors d'un entretien accordé à Lyon-Capital, Michel Rocard déclare que la "la télévision tue la démocratie".  En effet, le petit écran accorde trop d'importance à la forme préférant le sensationnel au fond.
L'ancien Premier ministre confie : "la télé est devenue le média dominant pour fixer les opinions. Et la presse écrite n'a pas su résister en faisant un contrepoids suffisant. Or l'image a des caractéristiques qui ne sont pas celles du texte écrit. L'image répugne à la complexité, demande du conflictuel, de l'affectif, du dramatique, et sûrement pas du complexe, du sociologique et de l'explicatif. L'image ne sait pas aider une pensée sur le long terme. Il faut de l'événementiel. Du coup, dans notre société, on ne réfléchit jamais à plus de quelques semaines. Et ça c'est tragique. La mort de la démocratie est là ! Mais peu importe qu'ils disent du bien ou du mal de tel ou tel homme politique, c'est un détail."
Avant d'ajouter : "Le champ politique maintenant par choix médiatique est voué aux gens qui présentent un fort avantage de charisme, homme ou femme. On peut appeler ça des qualités d'ordre théâtral."

Source : Lyoncapital.fr
Le Pèlerin

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7 juin 2010 1 07 /06 /juin /2010 05:25

France - Laïcité stricte, laïcité ouverte, laïcité critique : Une interprétation du débat français (1/2)

laicite.jpg

 

Selon les fondateurs tels Jules Ferry, l’école, lieu public par excellence car creuset de la formation des futurs citoyens, se devait d’être non antireligieuse, mais bien non-religieuse, afin de n’offenser personne. Non seulement les programmes et les bâtiments devaient être laïcisés, mais les instituteurs eux-mêmes devaient être soumis à un strict devoir de réserve. Selon le nouveau paradigme de la laïcité ouverte, l’Islam devrait prendre sa place parmi les écoles spirituelles de France, et bénéficier d’un soutien public, proportionnel à son statut de deuxième religion de France.  

La laïcité est (avant tout) un principe de séparation entre le politique et le religieux. Mais qu’implique ce principe de séparation ? Pour les partisans de la loi française de 2004, le port de « signe ou tenue manifestant une appartenance religieuse » à l’école publique porterait atteinte à la séparation des sphères publiques et privées. Les élèves, quand ils entrent dans l’enceinte publique qu’est l’école, se doivent de respecter le principe de neutralité religieuse de l’Etat. La neutralité de l’Etat, à son tour, est elle-même une garantie d’égalité entre tous les citoyens, croyants et non-croyants. Dans ce qui suit, j’interroge plus avant les relations entre séparation, neutralité religieuse et égalité citoyenne.

Pour ce faire, je reconstitue la logique du débat français, identifiant deux positions théoriques, celle de la « laïcité stricte » et celle de la « laïcité ouverte », avant de démontrer que toutes deux peinent à conceptualiser adéquatement l’articulation entre faits et normes — entre l’égalité « abstraite » et l’inégalité « réelle ». En conséquence, la laïcité qu’elles défendent est insuffisamment critique. Une laïcité plus « critique » prendrait en compte le contexte « catho-laïque » dans lequel la laïcité a été historiquement formulée en France. Elle réaffirmerait le principe de séparation entre public et privé, ainsi que celui de la neutralité religieuse de l’Etat, tout en garantissant la liberté de religion de tous les croyants en France, y compris les musulmans.

La laïcité n’est donc pas incompatible avec la pratique de la religion musulmane, n’en déplaise à ceux qui renvoient dos à dos laïcité et Islam, confondant ainsi Islam et islamisme. Dans un contexte politique où l’invocation rhétorique de la laïcité sert de paravent à une banalisation inquiétante des préjugés antimusulmans et souvent racistes en France, il est important de revenir aux sources de la laïcité. Celle-ci implique, non seulement l’éradication du religieux, mais la mise à distance de la sphère publique vis-à-vis du religieux, au nom de l’égalité entre croyants, et entre croyants et non-croyants. Dans ce qui suit, je reconstitue deux positions théoriques présentes dans le débat français, avant d’en montrer les limites respectives, à l’aune de ce que j’appelle une laïcité critique.

I. Laïcité stricte

En décembre 1905, les républicains abolissent le Concordat qui, depuis 1801, régulait les relations entre l’Etat français et les « religions reconnues » et avait, en pratique, renforcé le pouvoir social et politique de l’Eglise catholique. La loi de séparation de 1905, dans ses deux premiers articles, proclame ainsi que la République assure la liberté de conscience, garantit le libre exercice du culte et ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. Inspirée par une vision « libérale » de la laïcité, la loi est fondée sur l’idée selon laquelle seule la séparation entre Etat et religion garantit le respect de tous les citoyens — croyants et non-croyants — de manière égalitaire.

La laïcité rejoint ici le libéralisme politique inspiré de John Locke et repris par John Rawls, qui affirme que l’Etat doit être religieusement neutre pour protéger effectivement la liberté de conscience de tous. Quels principes fondamentaux cette séparation honore-t-elle ? Principe de liberté : l’Etat permet la pratique libre de toute religion, dans les limites prescrites par l’ordre public et la protection des droits fondamentaux. Il ne promeut ni ne combat aucune croyance religieuse. Principe égalitaire, car la séparation interdit le traitement préférentiel (même symbolique) d’une religion. Les régimes de séparation, tels le régime français ou américain, s’opposent ici aux régimes d’établissement, tels le régime en vigueur au Royaume-Uni qui attribue à l’Eglise établie un certain nombre de privilèges.

Principe agnostique, car l’Etat non seulement ne favorise pas une religion par rapport à une autre, mais, de surcroît, ne favorise pas la religion par rapport à l’athéisme ou l’agnoticisme. Seule une culture publique laïque est en mesure de protéger la liberté de conscience, comprise comme permettant « l’adhésion libre à une religion et le refus de toute religion ». Principe individualiste : depuis 1789, la doctrine républicaine française accorde des droits non pas aux groupes religieux, mais aux individus, sur le modèle de l’émancipation des juifs. On connaît les termes célèbres du député révolutionnaire Clermont-Tonnerre : « Il faut tout refuser aux juifs en tant que nation, et tout leur accorder en tant qu’individus. » Ainsi, la République ne reconnaît pas (en droit) l’existence de minorités religieuses ou culturelles.

Finalement, la laïcité est un principe de justice, qui pose que les citoyens sont traités de manière juste précisément quand ils sont traités de manière identique : l’uniformité juridique est la version républicaine de l’égalité. La laïcité est un principe d’égalité formelle et non substantielle : par exemple, il n’y a rien d’injuste au fait que la règle de non-financement des religions, du moment qu’elle s’applique de manière uniforme à tous, aboutissent à des inégalités de fait, par exemple, dans le nombre effectif de lieux de culte accessibles aux membres de telle ou telle religion.

Il y a donc des similarités importantes entre le républicanisme français et le libéralisme égalitaire et universaliste tel que celui de Barry. Mais la laïcité républicaine va plus loin que la neutralité libérale anglo-américaine dans sa conception de la séparation entre public et privé, et entre Etat et religion. En France, le respect de la conscience s’efface devant le principe de primauté de la sphère publique laïque — contrairement, notamment, aux Etats-Unis où la clause du non-établissement est subordonnée à, ou interprétée à la lumière de, la liberté de conscience ou libre exercice. Sans doute, ces différences s’expliquent par des passés religieux différents : aux Etats-Unis, l’Etat se devait d’être neutre vis-à-vis des innombrables sectes religieuses florissant dans la société civile, alors qu’en France, l’Etat a dû créer un contrepoids efficace à l’influence sociale, culturelle et politique de la puissante Eglise catholique.

La République a érigé son propre ordre normatif — d’où une construction plus extensive, en France, de la sphère publique (qui inclut notamment l’école où se forme le citoyen) et une conception plus stricte de la séparation entre public et privé (qui requiert de la part des citoyens un devoir de réserve religieuse). Ainsi, la laïcité n’est pas simplement une doctrine de séparation — qui prescrit les limites des actions des institutions publiques en vue de protéger la liberté des citoyens —, c’est aussi une doctrine de conscience qui prescrit les limites des actions des citoyens et des organisations religieuses. Par exemple, on attend des groupes religieux qu’ils se « laïcisent » : ils doivent reconnaître la supériorité de la sphère publique sur la sphère privée et religieuse, adapter leur dogme pour le rendre compatible avec les règles de la République, se « gallicaniser » en démontrant leur loyauté envers la France et non envers des autorités étrangères, ne pas introduire d’arguments religieux dans le débat public et ne pas chercher à convertir autrui (la tradition française se méfie du prosélytisme).

On reconnaît dans ces principes les traces du long combat entre la République et l’Eglise catholique. Elles constituent une source certaine de la méfiance laïque vis-à-vis de l’Islam contemporain, où la séparation entre affaires spirituelles et affaires temporelles n’est pas évidente ; où le point de référence pour les croyants est l’oumma universelle et non la République et où la visibilité symbolique des rituels et symboles met à mal la tradition de relative discrétion religieuse héritée de l’histoire européenne.

Le devoir de réserve religieuse s’applique, en priorité, aux agents de l’Etat dans l’exercice de leurs fonctions. Dans la tradition française, il faut non seulement que les institutions publiques soient neutres (c’est-à-dire impartiales) mais il faut aussi qu’elles apparaissent neutres et impartiales. L’affichage par un fonctionnaire public de ses convictions religieuses a été historiquement perçu comme un facteur de défiance et de division. Ainsi, la jurisprudence est elle très stricte concernant le port de signes religieux par les agents publics — récemment vis-à-vis du port du foulard musulman par une inspectrice des impôts. Cette interdiction s’applique quel que soit le statut de l’agent et qu’il porte un uniforme ou non (dans d’autres pays, c’est le problème de la dérogation à l’uniforme que pose le port de symboles religieux). En somme, ce qu’on appelle en France « l’éthique du service public » impose des restrictions à la pratique religieuse dans la sphère publique.

C’est à l’école publique que la doctrine de la laïcité — à la fois comme doctrine de séparation et comme doctrine de conscience — a trouvé son application la plus complète, ce qui n’est guère étonnant si l’on tient compte de la centralité de l’éducation au sein du projet républicain français. Nul besoin de rappeler l’importance de la laïcisation des écoles pour la fondation de la citoyenneté républicaine sous la Troisième République. Selon les fondateurs tels Jules Ferry, l’école, lieu public par excellence car creuset de la formation des futurs citoyens, se devait d’être non antireligieuse, mais bien non-religieuse, afin de n’offenser personne. Non seulement les programmes et les bâtiments devaient être laïcisés, mais les instituteurs eux-mêmes devaient être soumis à un strict devoir de réserve.

Qu’en est-il, en revanche, des élèves ? En général, les usagers du service public ne sont pas tenus à un devoir de réserve religieuse ; de surcroît, les élèves des écoles publiques françaises ne portent pas d’uniforme. La loi de 2004 étend aux élèves le devoir de réserve religieuse déjà imposé aux professeurs, s’appuyant pour cela sur l’idée que les écoles ne sont pas des services publics ordinaires ni les élèves de simples usagers. Pour reprendre l’expression de Catherine Kintzler, l’école est une « communauté de citoyens » en miniature et, dès lors, les principes de tolérance de la société civile ne peuvent s’y appliquer pleinement. Telle est, pour l’essentiel, la base argumentative qui permet aux républicains d’affirmer que le principe de neutralité laïque de l’Etat requiert l’interdiction du port des signes religieux, en particulier le foulard musulman, par les élèves des écoles publiques.

Ainsi, selon les partisans de la laïcité stricte, le port du hijab à l’école battrait en brèche les principes énoncés plus haut, car il symboliserait à la fois l’affirmation des différences privées et de divisions religieuses dans l’espace commun public, la prédominance du croyant sur le citoyen dans la sphère publique, l’introduction de distinctions injustifiables entre élèves (croyants et non-croyants, filles et garçons), la remise en cause de la mission civique de l’école, quand il va de pair avec le refus de participer à certain cours et qu’il ouvre la perspective d’une « école à la carte » et un danger de prosélytisme et de non-respect de la liberté de conscience de ceux qui ne souhaitent pas le porter, à un âge où les enfants sont particulièrement vulnérables. L’interdiction du port du foulard permet ainsi d’approfondir cinq valeurs centrales de la doctrine de la laïcité : la préservation d’un espace public commun et non-sectaire, la distinction entre la dimension privée et la dimension publique des identités individuelles, l’égalité devant la loi et la non-discrimination, la visée d’une éducation civique universelle et la garantie de droits religieux égaux pour tous.

L’interdiction des signes religieux à l’école est une des formes institutionnelles que prend l’idéal de neutralité de l’Etat dans la doctrine républicaine classique. Que penser de l’idéal de la laïcité stricte, tel qu’il est ainsi reconstruit de la manière la plus logique et cohérente possible ? La deuxième partie de cet article reconstitue, de la même façon, la logique interne de la critique de la loi de 2004, au nom de ce qu’on a pu appeler une « laïcité ouverte ». Dans la troisième partie, je proposerai enfin quelques éléments d’évaluation de ces deux positions, à l’aune d’une laïcité plus « critique ».

II. Laïcité ouverte

Selon la laïcité ouverte, l’interdiction des signes religieux à l’école n’est pas justifiable au regard d’une laïcité bien comprise, selon laquelle « les écoles sont laïques, non parce qu’elles interdisent l’expression de fois différentes mais parce qu’elles les tolèrent toutes » (David Kessler). Dans cette perspective, la laïcité implique, non la séparation, mais l’inclusion maximale de toutes les religions. Replaçons cette analyse dans un contexte plus général d’une remise en cause de la laïcité stricte et de ses fondements historiques, philosophiques et sociologiques. On peut distinguer deux types de critiques de l’argument pour une laïcité stricte, la seconde plus radicale que la première. La première montre que la laïcité comme « doctrine de séparation » est compatible avec le port de signes religieux par les élèves dans les écoles : elle critique l’interprétation de la laïcité comme une « doctrine de conscience ». La seconde va plus loin et critique la laïcité comme « doctrine de séparation », et conteste l’idée selon laquelle la séparation entre Etat et religion, ou neutralité de l’Etat, est en fait compatible avec l’idéal égalitaire.

Selon la première critique, l’interdiction du foulard à l’école met à mal les idéaux de la laïcité. Ainsi, la protection de la liberté de conscience, qui est l’un des buts affichés de l’idéal laïque. En comprenant la laïcité comme limite et non comme garantie de la liberté religieuse, les tenants d’un républicanisme classique ont en fait trahi la signification originelle de la laïcité. La liberté de religion ne peut être limitée par l’Etat que si son exercice menace les droits et libertés d’autrui ou pose une menace à l’ordre public.

Le hijab n’étant pas en soi une menace à l’ordre public ou une forme de prosélytisme, mais simplement un symbole de foi, il conviendrait de « ne pas sacrifier la liberté de ceux qui croient à la peur d’offenser ceux qui ne croient pas », pour reprendre la forte expression de Jean Rivero en 1949 (au sujet des crucifix dans les écoles). Et si l’on peut admettre que le port de signe religieux par certains agents publics puisse mettre à mal l’apparence d’impartialité de l’Etat, il est plus difficile de concevoir que les élèves soient eux-mêmes soumis à un devoir de réserve — au sens où ils devraient se défaire de leur identité religieuse — afin de pouvoir bénéficier de l’instruction. La laïcité bien comprise limite la liberté religieuse des instituteurs et autres agents publics afin de protéger celle des élèves et autres citoyens ordinaires, qui ne sont en conséquence pas soumis à un devoir de réserve.

D’autre part, l’interdiction du foulard conduit in fine à l’exclusion des jeunes filles qui souhaitent le porter, contredisant ainsi la philosophie centrale des écoles républicaines qui était précisément d’accueillir tous les élèves quelles que soient leur origine, race ou religion. Elle est aussi potentiellement discriminatoire, pénalisant les religions pour lesquelles le port de signes est (perçu comme) obligatoire. Cette première critique réconcilie donc la tolérance du hijab avec les idéaux de laïcité : liberté, égalité, inclusion. Elle ne remet pas en cause l’idéal de séparation, mais s’interroge en revanche sur les effets coercitifs, discriminatoires et exclusifs de l’extension d’une stricte doctrine de conscience aux élèves des écoles. La deuxième critique de l’argument pour une laïcité stricte, de son côté, est plus radicale. Elle conteste l’idéal même de séparation, arguant que la laïcité n’est qu’une idéologie qui masque la réalité inégalitaire du statut des différentes religions en France et de l’intervention prononcée de l’Etat dans la sphère religieuse. Ainsi y a t-il un fossé préoccupant entre « laïcité imaginée » et « laïcité réelle » en France.

Premier constat : la séparation entre Etat et religion en France est partielle et incomplète. Selon des auteurs comme Jean Baubérot, abstraction faite de l’idéologie officielle de laïcité, les relations entre Etat et groupes religieux en France diffèrent peu de celles observées dans les autres pays européens. Ainsi l’Etat apporte des soutiens financiers divers aux religions : financement d’aumôneries, entretien des édifices religieux construits avant 1905, avantages fiscaux aux associations religieuses selon la loi 1901 (comme les charities britanniques), subventions publiques versées aux écoles privées (subventions conditionnées par un contrat d’association avec l’Etat). Ajoutons à cela l’anomalie de l’Alsace-Moselle, où pour des raisons historiques la loi de 1905 ne s’applique pas (ce qui implique un enseignement religieux dans les écoles, le fait que les ministres du culte soient payés par l’Etat, etc.). En outre, la laïcité, dans ses structures institutionnelles et mentales, s’est modelée sur le catholicisme, pour mieux le supplanter (ainsi l’école est-elle définie comme un « sanctuaire », les instituteurs comme des « missionnaires » de l’universel…).

Tout s’est passé comme si, historiquement, le pouvoir matériel et symbolique de l’Eglise n’a pu être contré que par la mise en place d’une « contre-société » et d’une « religion civile » laïques capables de reproduire l’intensité de l’attachement affectif à la puissante religion nationale. Mais la laïcité n’a pas pour autant remis en cause les soubassements culturels du passé français de « fille aînée de l’Eglise » — comme en témoigne, par exemple, le nombre de jours fériés catholiques. On a pu ainsi judicieusement parler de « catho-laïcité » ou de « catholicisme sans christianisme » pour désigner la doctrine officielle de la République française.

Ainsi, la laïcité réelle a peu de rapport avec la laïcité imaginée, celle qui postule la neutralité stricte et la séparation entre Etat et religion. Second constat, partagé par les adeptes d’une laïcité ouverte : la séparation stricte entre Etat et religion est devenue superflue et redondante. Certains critiques ont fait valoir que même si la séparation a eu une utilité historique, elle est maintenant dépassée par le nouveau rôle public joué par les religions. Avec la fin du « conflit des deux France », les religions ne seraient plus exclues de la sphère publique mais, au contraire, reconnues comme des partenaires légitimes de la discussion publique. De surcroît, l’Etat reconnaît de plus en plus le rôle que peuvent jouer les associations religieuses dans le domaine social et culturel. Sur le plan institutionnel, ceci s’est traduit, par exemple, par la contribution des groupes religieux au débat public et la représentation des autorités spirituelles et religieuses dans les comités d’éthique. Selon ce « nouveau pacte laïque » que certains appellent de leurs vœux, la laïcité devrait maintenant être vue simplement comme un cadre régulateur du pluralisme des conceptions éthiques, qui permet la participation « non-cléricale » des Eglises au débat public.

En quoi la laïcité ouverte est-elle compatible avec l’idéal d’égalité ? On peut dire, pour simplifier, qu’elle s’accompagne d’une transition de l’égalité formelle à l’égalité réelle. Elle part du principe qu’il faut que la laïcité s’adapte aux réalités sociales ; que les principes s’accordent mieux aux faits contemporains. Ainsi, la séparation — garantie formelle de l’égalité entre religions selon la doctrine traditionnelle — ne devrait pas constituer le nec plus ultra de la laïcité. Celle-ci, en tant qu’idéal égalitaire, devrait au contraire rechercher et promouvoir un traitement équitable des différents groupes religieux par l’Etat. Car le problème est le suivant. La non-neutralité religieuse de l’Etat et la reconnaissance de facto des organisations religieuses soulèvent le problème du traitement inéquitable des minorités religieuses, telles les musulmans. Elle rend incohérente la position des républicains classiques, qui demandent aux musulmans de respecter les dogmes de la « laïcité imaginée » tout en concédant les avantages pragmatiques de la « laïcité réelle » aux croyants de religions plus traditionnellement implantées en France.

Or, dans le contexte de la laïcité réelle (plutôt qu’imaginée), il est plus juste — plus équitable — d’étendre aux musulmans les privilèges déjà accordés aux autres religions, et leur faire bénéficier de mesures de rattrapage ou d’exceptions à la loi commune. Dans cette perspective seraient légitimes les requêtes suivantes : soutien public aux écoles privées musulmanes, nomination d’imams dans les écoles et les prisons, aide publique à la construction de mosquées, introduction de repas sans porc dans les collectivités publiques, extension des autorisations pour congés religieux.

La justice demande non pas l’égalité formelle, mais des lois différentes pour traiter des situations différentes, afin de réduire l’écart entre la laïcité normative et la réalité incontournable du traitement injuste des membres de religions plus récemment implantées en France. Par exemple, les musulmans pourraient recevoir compensation pour le fait qu’ils n’ont pu bénéficier des exceptions à la règle de non-financement des lieux de cultes, exceptions inscrites dans la loi de 1905 : comme ils étaient peu présents sur le sol (métropolitain) en 1905, aucun de leurs lieux de culte n’est entretenu par la collectivité publique. Il n’est donc pas anormal que l’Etat les aide maintenant à construire des mosquées, en guise de compensation rétrospective — soit en suspendant exceptionnellement la loi de 1905, soit en interprétant de manière souple la distinction entre activités cultuelles et activités culturelles (ce qui permet déjà de financer des centres islamiques contenant en pratique des lieux de prière ou même une mosquée). D’autres, tels l’archevêque de Strasbourg, ont pu proposer qu’une version du Concordat appliqué en Alsace-Moselle soit étendue à l’ensemble du territoire français, offrant ainsi à toutes les religions, y compris l’Islam, les bénéfices du financement public et de l’enseignement religieux dans les écoles.

Selon la laïcité ouverte, étant donné que l’Etat ne respecte que partiellement le principe de neutralité religieuse de l’espace public, il est incohérent de blâmer les musulmans pour leur incapacité soi-disant congénitale à séparer le public et le privé. L’Islam n’est pas, en soi, incompatible avec la laïcité. Mais tout dépend de la façon dont la sphère publique est construite (et par qui). Dans la sphère publique française, plus « catho-laïque » que « neutre », il est plus facile d’être chrétien que musulman.

Selon le nouveau paradigme de la laïcité ouverte, l’Islam devrait prendre sa place parmi les écoles spirituelles de France, et bénéficier d’un soutien public, proportionnel à son statut de deuxième religion de France. Une notion de proportionnalité (ou de représentativité) sert ainsi d’aiguillon à la mise en œuvre de la doctrine, plus substantielle que formelle, d’équité entre les religions. La position correspondant à l’idée d’un républicanisme tolérant (ou d’une laïcité ouverte) consiste donc à substituer un traitement équitable et pragmatique des religions à l’attitude d’abstention préconisée par le principe de neutralité, puis à promouvoir une politique de reconnaissance des identités religieuses collectives au sein de l’espace public.

Il s’agit donc tout à la fois de reconnaître la contribution des groupes religieux à la vie publique (en reconnaissant sa positivité) et de promouvoir un traitement plus équitable de la communauté musulmane. Que penser de ce débat entre laïques stricts et laïques tolérants ? Il me semble que ni les uns ni les autres n’ont pris la mesure de ce que j’appelle la « neutralité de statu quo ». En conséquence, le républicanisme qu’ils défendent est insuffisamment critique.

(A suivre)

C. L. : Texte de la conférence prononcée lors des Débats d’El Watan tenus le 28 mai 2010 à Alger sur le thème « La laïcité à l’épreuve de l’Islam ».

Cécile Laborde est professeur de théorie politique à l’université de Londres. Elle a récemment publié Français, encore un effort pour être républicains ! (Paris, Seuil, 2010) dont les analyses qui suivent sont extraites

Source El Watan  Cécile Laborde

Le Pèlerin

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