L'Abécédaire de la présidence Hollande (1/4)
Pour certains, nombreux, François Hollande a déjà rempli sa mission, le 6 mai 2012. Il a viré Sarkozy. Appelez cela de l'antisarkozysme primaire. Il fallait rester primaire le temps d'une époque primaire.
Nos archives sont là pour témoigner d'un changement. Non pas celui d'une nouvelle société, ni d'une révolution fiscale, ni d'un ralliement général de l'Europe entière sur des positions de gauche. Nous pouvions aussi trouver nombre de critiques à faire contre cette première année franchement ni suffisamment à gauche ni suffisamment stable. Mais il fallait clore cette décennie perdue, et les craquements accélérés que l'ancien monarque causait au pays à coup de Kärcher buissonniens.
Nous sommes le 6 mai. Voici donc le premier abécédaire de la présidence Hollande.
Afghanistan
Le retrait des forces militaires françaises combattantes est achevé à la fin de l'année 2012.
Algérie
Hollande se déplace en Algérie, en octobre. Quelques jours avant, il prononce quelques mots d'hommage aux victimes du 17 octobre 1961. C'est inédit sous la Vième de la part d'un Président de la République. Le geste est salué par les Algériens, fustigé par quelques nostalgiques de l'OAS.
Allocations familiales
Ayrault confirme en avril que les allocations familiales des 15% plus fortunés des ménages seront diminuées. Bizarrement, le Front de gauche se joint à l'UMP pour protester contre cette mesure. Il critique la rupture de l'universalité des prestations sociales.
Allocation de rentrée scolaire
Elle est augmentée de 25% dès septembre 2012.
Arménie
François Hollande n'assiste pas aux commémorations du génocide de 1915. Mais il confirme un nouveau texte.
Austérité
Voir "Rigueur".
Banques
La loi de séparation bancaire est votée fin 2012. A gauche, on critique qu'elle ne prévoit aucun démembrement stricto sensu des banques, même si l'efficacité de cette dernière mesure n'est nullement prouvée. Seules les activités purement spéculatives sont désormais isolées. Karine Berger, rapporteuse socialiste du texte à l'Assemblée, défend la "paire de ciseaux" que la loi créé enfin. Les bonus des dirigeants et des traders sont interdits en cas de difficultés. Les banques ont l'interdiction d'utiliser les dépôts des clients pour financer des activités spéculatives. La situation chypriote donne un exemple quelques semaines plus tard. L'Europe y impose le démembrement d'une banque trop toxique et des prélèvements sur les gros dépôts (>100.000 euros).
La taxe sur les bénéfices des banques est augmentée de 15%.
La loi bancaire prévoit aussi que les commissions bancaires soient plafonnées, et "avec des plafonds plus faibles pour les personnes en situation de fragilité" rappelle l'Elysée. Banque Publique d'Investissement
Promesse de campagne, la BPI est créée le 1er janvier 2013, avec 42 milliards d’euros à disposition: 20 milliards d’euros de prêts, 12 milliards d’euros de garanties, 10 milliards d’euros d’investissements en fonds propres
Cahuzac
Le ministre du budget présentait bien. Tout au long de l'été, il sabre dans les ministères, appliquant à la lettre les coupes nécessaires pour redresser les comptes publics. Le 5 décembre 2012, le site Mediapart lâche une bombe. Il accuse Cahuzac d'avoir fraudé le fisc en cachant 600.000 euros en Suisse puis à Singapour. Il publie un mauvais enregistrement sonore datant d'une douzaine d'années. Il faut expertiser la chose. Hollande laisse faire. Le ministre ment et se défend avant d'avouer, quand le procureur confirme la véracité probable de la bande, trois mois plus tard. Cahuzac démissionne. (voir "Moralisation").L'opposition de droite oublie l'affaire Bettencourt. L'opposition de gauche dénonce l'hypocrisie d'un système. On reproche même à Hollande ou Valls ne n'avoir pas fait enquêter clandestinement sur le dit ministre.
Chômage
Le cap des 3 millions de sans-activité est franchi au cours de l'été. Pôle Emploi hérite de 2.000 collaborateurs supplémentaires. A fin mars, le nombre de chômeurs atteint 5,0 millions, dont 3,48 millions sans aucune activité, et 10% de la population active. Les catégories les plus frappées demeurent les jeunes et les séniors, dont ceux virés de la retraite par la réforme Sarkozy. En novembre, Hollande se fixe un an pour inverser la tendance. La dégradation supplémentaire de l'économie - dans toute la zone euro - achève cet espoir quatre mois plus tard.
(Cf. "Emploi")
Consommation
Le 2 mai, Benoit Hamon présente sa loi sur le renforcement des droits des consommateurs. Elle prévoit notamment et enfin des "class action" à la française.
Crédit Impôt Compétitivité Emploi
C'est la grande mesure de septembre, issue du rapport de Louis Gallois. L'ancien patron de la SNCF et d'EADS a été nommé Haut Commissaire à l'Industrie en juillet. Il prône des allègements de charges en tous genres pour sauver l'industrie française. Le gouvernement ne suit pas, mais fait voter 20 milliards d'euros de CICE, financé par des économies ailleurs et une hausse de la TVA (cf. "TVA"). Le CICE est un crédit d'impôt versé dès 2013, calculé en fonction de la masse salariale des entreprises: "Il réduira d’environ 4 % dès 2013 puis de 6 % à compter de 2014 le coût du travail de la masse salariale brute concernée, jusqu’à 2,5 SMIC, dans toutes les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés ou sur le revenu." A gauche, certains couinent d'un tel effort pour les entreprises.
Culture
La ministre Aurélie Filippetti assume la rigueur (-4% de budget en 2013), et supprime nombre de grands travaux. Une mission d'ensemble est confiée à Pierre Lescure pour auditer l'exposition des films, le droit d'auteur, la lutte contre le piratage. Le Centre National de la Musique est abandonné. Le gouvernement rétabli le taux réduit à 5,5% (contre 7%) pour les libraires et la billeterie.
Cumul des mandats
Le 3 avril 2013, le conseil des ministres adopte une loi interdisant le cumul des mandats d'exécutifs locaux et de députés ou sénateurs. Reste à voter la loi. L'entrée en vigueur est malheureusement reportée à ... 2017.
Dailymotion
Arnaud Montebourg, ministre du Redressement Productif, bloque la vente à Yahoo d'une filiale de France Télécom.
Décentralisation
En novembre, le conseiller territorial est supprimé. En avril, le Sénat rejette la réforme des élections locales. Le texte repassera.
(Voir aussi: "Cumul des mandats").
Déficit
En 2013, le déficit budgétaire est prévu à -62 milliards d'euros (contre 85 milliards en 2012). L'objectif de réduire à moins de 3% du PIB le déficit budgétaire dès 2013 est reporté (d'au moins) une année. La croissance économique, prévue basse par Hollande, sera nulle voire négative (Cf. "Rigueur")
Délit de faciès
Le gouvernement promet un nouveau code de déontologie pour l'été 2013, avec le rétablissement du matricule apparent. Mais le ministre Valls n'a pas mis en place la remise d'un récépissé au contrôle d'indentité.
Dépendance
Un réforme de la prise en charge de la dépendance est en préparation. La loi est annoncée pour la fin de 2013.
Dette
La dette publique du pays atteint 1832 milliards d'euros en juin 2012, et encore 1.818 milliards à fin 2012.
Dictateurs
Après son élection, Hollande a reçu des dictateurs en tous genres. Il n'avait pas promis de ruptures diplomatiques généralisées. Les rencontres ont été discrètes. Avec Vladimir Poutine, l'échange fut même publiquement glacial.
Dividendes
En juillet 2012, un prélèvement de 3% des dividendes versés est voté.
Education
L'Education nationale rompt avec 5 années de réduction d'effectifs. Vincent Peillon, le ministre, annonce la création de 60.000 postes, dont 43.000 dès 2013/2014 . Dès la rentrée 2012, 1000 postes de renfort sont débloqués en urgence. Pour septembre 2013, 3.000 postes sont affectés à l’accueil des enfants de moins de 3 ans, "en priorité dans les quartiers en difficulté". 4.000 sont affectés au décrochage scolaire . Et 7.000 aux classes de primaires pour augmenter le nombre de maître(sse)s.
Vincent Peillon annonce également une réforme de la formation des enseignants. La loi sur l'enseignement supérieur prévoit de fixer une proportion minimale de bacheliers technologiques et professionnels dans les cycles supérieurs courts (BTS, IUT). Quelque 20.000 jeunes sans diplômes sont ciblés par un dispositif ad hoc pour raccrocher dès septembre 2013.
La gratuité de l'enseignement des enfants d'expatriés, mise en place par Sarkozy, est supprimée.
Peillon rétablit aussi la semaine de 4 jours et demi, au grand dam des syndicats d'enseignants. Et ce, dès la rentrée 2013 pour environ 1,2 million d'élèves. L'objectif est d'alléger la journée d'enseignement.
Emploi
En janvier, le dispositif de contrat de génération - l'une des promesses phares du candidat Hollande - est voté à l'Assemblée par la gauche réunie. Environ 500.000 embauches sont espérées dans les 5 ans. L'UMP et l'UDI votent contre ou s'abstiennent. Les emplois d'avenir, pour quelque 150.000 jeunes en difficulté, sont également votés en octobre; 20.000 sont en place à fin avril 2013.
Plus clivante, la loi de sécurisation de l'emploi, issue de l'Accord National Interprofessionnel signé le 10 janvier 2013 entre le MEDEF et trois syndicats de salariés, provoque grincements et hurlements à gauche. Elle prévoit de belles avancées, comme la surtaxation des CDD courts, ou la création d'un compte personnel de formation transférable et d'un droit rechargeable à l'assurance chômage; mais il prévoit aussi l'accélération exécution des plans sociaux dans les entreprises de moins de 50 salariés et la modification des contrats de travail par accord collectif dans les entreprises en difficulté. la loi intègre des représentants de salariés dans les conseils d'administration.
A suivre
Le Pèlerin