Grippe aviaire : Un avis semble - t- il éclairé, Les Ornithologues confiants
Un spécialiste des populations aviaires estime que l'épidémie de grippe
va vite s'essouffler. La mortalité des oiseaux sauvages ne semble pas
exceptionnelle.
« Il n'y a pas de raison de particulièrement s'inquiéter cette année. »
Le propos rassurant de l'ornithologue Romain Julliard détonne dans cette
saison de panique aviaire. Ce spécialiste des populations d'oiseaux au
Muséum d'histoire naturelle cache bien sa colère derrière sa placidité
naturelle. Car la position des ornithologues tranche avec l'alarmisme «
précautionneux » des virologues. Pour Bertrand-Pierre Galey, directeur
général du Muséum national d'histoire naturelle, ces scientifiques de
laboratoire manquent d'expérience du terrain et comprennent mal la
dynamique d'un virus dans une population sauvage.
http://www.lesechos.fr/info/rew_metiers/4395123.htm
« Le Canard Enchaîné » du mercredi 15 mars 2006
Onze mille dindes et des brouettes
Et si les oiseaux migrateurs, dont on ne cesse de nous rebattre les oreilles, n'étaient pas les principaux propagateurs de la grippe aviaire ? Et si c'était l'élevage industriel le grand coupable ? Ceux qui défendent cette thèse ne sont pas des zozos, ainsi Juan Lubroth, expert à la FAO, en janvier dernier : « // est très facile de blâmer les oiseaux sauvages et la migration des oiseaux parce que personne n 'est responsable. Il est possible que les oiseaux sauvages puissent présenter le virus, mais c'est par les activités humaines de commerce et d'échange que la maladie se propage. » Discours évidemment peu médiatisé, puisqu'il heurte de front les intérêts des agro-industriels, et remet en cause le fonctionnement de la filière avicole, celle qu'il faut défendre à tout prix, à en croire PPDA nous lançant régulièrement son cri patriotique « Mangez, du poulet ! ».
On doit à la très sérieuse ONG espagnole « Grain » un argumentaire des plus convaincants sur « le rôle central de l'industrie de la volaille dans la crise de la grippe aviaire », qui s'appuie sur quatre arguments principaux.
Un, ce n'est pas un hasard si la grippe a pris naissance en Asie du Sud-Est : dans cette région, la production de volailles a récemment explosé et s'est développée surtout dans des fermes industrielles intégrées dans des circuits internationaux.
Deux, la propagation de la maladie ne correspond pas avec les itinéraires et les saisons de migration, mais a suivi les voies de circulation et de transport des volailles, oeufs à couver, alimentation animale (routes et chemin de fer notamment).
Trois, la volaille vivant dans des élevages de basse-cour a toujours connu des grippes, lesquelles n'ont pas évolué vers des formes hautement pathogènes, car la faible densité et la diversité génétique y maintenaient la charge virale à des taux bas. C'est dans les élevages concentrationnaires que le virus bénin évolue rapidement vers des formes plus pathogènes et fortement transmissibles, qu'il transmet ? aux oiseaux sauvages.
Quatre : si le Laos n'est pratiquement pas touché par la grippe aviaire, ce n'est pas parce que les oiseaux migrateurs éviteraient miraculeusement de le survoler, mais parce que les autorités ont tout simplement fermé leurs frontières à la volaille de Thaïlande, et que les éleveurs n'y nourrissent pas leurs bêtes à plume avec des aliments industriels (lesquels sont composés, entre autres ingrédients, de matières fécales, plumes, litières, etc.).
« Nous partageons totalement cette analyse », dit René Louail, de la Confédération paysanne, qui s'indigne des récentes mesures gouvernementales, notamment celle qui attribue à la filière une subvention destinée à encourager la fermeture des productions dites de qualité (bio, label, etc.). « Alors que c'est le contraire qu'il faut faire ! Profiter de cette crise pour aider les éleveurs à faire de la qualité, à ne plus entasser 27 poulets au mètre carré, à ne pas les tuer au bout de 27 jours seulement... » Eh non : aujourd'hui, on traque les poulets qui gambadent nez au vent, et on présente l'élevage industriel comme la panacée. « Les crises sanitaires ont toujours été des outils de restructuration », note Bové. Pas forcément la bonne.
Et plus personne ne se demande pourquoi, à peine arrivé en France, le virus s'est attaqué à un élevage de 11 000 dindes ...
Communiqué de Presse.
Grippe aviaire : n'accusons pas les oiseaux migrateurs
Le premier cas de grippe aviaire vient d'être détecté en France sur un canard sauvage, un fuligule milouin retrouvé mort dans la région des Dombes (Ain). Après la Grèce, l'Italie, l'Autriche, l'Allemagne et la Slovénie, il était prévisible que la France se trouve confrontée à l'épizootie.
> Le fuligule milouin, comme les cygnes tuberculés retrouvés porteurs du virus, n'est pas un migrateur africain. Ces espèces hivernent en Europe et peuvent se déplacer sur quelques centaines de kilomètres à l'occasion de vagues de froid qui les chassent de leurs zones d'hivernage. Il est probable que ces oiseaux se sont contaminés au contact d'élevages de volailles en Europe de l'est, juste avant d?entamer leur déplacement. Une autre hypothèse, concernant les cygnes, est qu'ils se soient infectés en se nourrissant sur des zones agricoles fertilisées avec du lisier de poulet (pratique courante en Europe centrale) : en effet le virus peut rester actif plusieurs semaines dans les fientes de volailles. >
> Si ces quelques cas d'oiseaux sauvages porteurs du virus sont abondamment médiatisés, il n'en restent pas moins très marginaux, au regard des millions d'oiseaux qui traversent ou séjournent dans nos pays. Les milliers de tests réalisés en Europe sur des oiseaux sauvages vivants se sont révélés négatifs jusqu'ici, et tous les oiseaux porteurs du virus sont retrouvés morts, ce qui indique que la forme hautement pathogène tue les oiseaux sauvages en quelques jours, sans qu'ils aient le temps de propager le virus sur de longues distances.
> Les foyers découverts dans des élevages au Nigeria, loin de toute zone humide fréquentée par des migrateurs, confirment que le principal vecteur de la grippe aviaire est le commerce et l'importation de volailles, légal ou non. Le nord du Nigeria est devenu la plus grande zone de production industrielle de volailles en Afrique, et ce pays représente le deuxième marché d'exportation de la Chine. L'arrivée du virus en Afrique démontre que le développement des échanges commerciaux et l'insuffisance des contrôles sanitaires sont à l'origine de l'extension de l'épizootie dans le monde.>
La fédération France Nature Environnement déplore que l'avifaune soit trop facilement montrée du doigt, et invite le public à ne pas céder à la psychose : les oiseaux migrateurs sont d'abord les victimes, non les responsables, de l'épizootie.
Information relayée par Le Pèlerin