Aux grands maux, les grands remèdes
Savoir - Outre l’art des herbes dont ils sont passés maîtres les Chinois ont mis au point, il y a plus de 2000 ans, une nouvelle science médicale, l’acupuncture, la guérison par les aiguilles.
Vous êtes-vous jamais posé cette question : Avant l’avènement de la radioscopie, du scanner et des injections intramusculaires, comment les hommes se soignaient-ils ? car il fallait bien qu’ils le fassent. Réponse : par les herbes tout simplement.
Depuis l’antiquité ils ont appris à identifier chaque herbe, à en connaître chaque vertu, et parfois même chaque contre-indication en cas de complication. Selon une étude très pointue, les Algériens seraient les meilleurs pharmacologues du monde au point, précisent certains historiens, que la plupart de leurs traités sont actuellement utilisés en Afrique subsaharienne, particulièrement au Niger.
Sans pousser les investigations aussi loin, nous remarquerons que, dans notre propre entourage, les anciens continuent d’utiliser la médecine des herbes quand la médecine classique dite moderne, échoue.
Contre une verrue qui refuse de disparaître, ils préconisent par exemple l’application de bave d’escargot sur la proéminence ou de l’eau utilisée par les bijoutiers pour tailler leurs pièces.
Certains herboristes ne se contentent pas d’utiliser une seule herbe pour guérir un mal, mais une potion à base de plusieurs herbes dont la part de chacune a été méticuleusement contrôlée pour venir à bout de maux complexes tels que la gastrite.
Outre l’art des herbes dont ils sont passés maîtres, les Chinois ont mis au point il y a plus de 2000 ans, une nouvelle science médicale, l’acupuncture, la guérison par les aiguilles.
Les résultats sont troublants et laissent perplexes. Indépendamment de cette médecine traditionnelle qui fait appel, soit aux herbes, soit aux aiguilles, c’est la médecine moderne actuelle qui impose aujourd’hui sa prééminence.
Elle est le fruit de plusieurs siècles de recherche, de tâtonnements, de victoires et d’échecs.
Elle évolue, s’adapte en fonction des découvertes, se remet souvent en cause, patine, mais va toujours de l’avant même si elle n’a pas tout résolu. Il y a cependant une troisième et dernière médecine dont on parle peu parce que ses résultats ne sont pas spectaculaires mais qui pourtant avance, lentement, mais sûrement : la psychiatrie.
Dès qu’on prononce ce mot, le nom de fou vient tout de suite à l’esprit, celui de possédé ou d’envoûté aussi. Celui de raqui suit aussitôt.
Il faut cependant reconnaître au Dr Charcot qui dirigeait l’hôpital La Salpetrière au siècle dernier à Paris d’avoir posé cet axiome essentiel dans le métier de psychiatre : un fou est d’abord un malade et doit être traité en tant que malade.
Raqui, un métier ?
Superstition - Il s'est même trouvé parmi eux des individus qui portaient une batterie de 12 amulettes recouvertes de cuir ou de cuivre.
Au plan de la santé mentale, nous nous trouvons aujourd'hui face à deux écoles, du moins dans les pays musulmans.
La roquia et la médecine du psychiatre. Sur ce plan, il y a beaucoup à dire car l'art de la roquia est devenu un métier qui nourrit bien son homme et qui fait des émules particulièrement au Maroc.
Une émission consacrée au sujet par Medi1 montre l'immense dépendance de nombreux citoyens du royaume concernant cette médecine.
Mais il faut faire la part des choses.
Qu'est-ce que la roquia et qui peut être raqui ?
La roquia consiste à combattre et à guérir un mal psychologique uniquement par l'invocation des sourates du Coran. C'est ce qu'on appelle la roquia chari'ia c'est-à-dire légale et autorisée par l'Islam.
Elle ne peut être pratiquée que par un homme du culte qui maîtrise parfaitement le Coran. L'autre roquia, la plus connue et la plus répandue au royaume, s'apparente à de la «cha’ euada» qui veut dire sorcellerie.
Normal dans un pays où les citoyens ont peur de deux choses quel que soit le milieu dans lequel ils évoluent :
Le s'hour (la magie noire) et l’aïn (le mauvais œil)
Il semblerait que cette peur soit tellement ancrée dans les esprits que de très hauts dignitaires de la cour vérifient chaque matin qu’on ne leur a pas collé quelque chose derrière le koursi.
Ils ont peur de tout et de tous et restent suspicieux au-delà des limites permises.
Les Algériens ne font pas exception et la plupart d'entre eux sont sur leurs gardes même si pour la consommation extérieure, ils nient faire cas de ce genre de problèmes, «du Moyen-âge précisent-ils». Il y a 20 ans, sinon un peu plus que le spectacle des Algériens qui se déshabillaient dans les bains maures était pitoyable, navrant, spécialement dans certaines régions du pays.
Il n'y en avait pas un qui n'avait pas son amulette son talisman ou son grigri bien caché sous la chemise.
Il y avait même parmi eux des individus qui trimballaient autour de leurs épaules une batterie de 12 amulettes recouvertes de cuir ou de cuivre. Sans doute la panoplie complète pour juguler le mauvais œil, le mauvais sort, la jalousie des collègues, la haine des envieux et, bien sûr, le petit machin supplémentaire pour attirer la chance, les bonnes grâces, les bonnes notes et les bonnes promotions
Une séance impressionnante
Exorcisme - Le saint homme crie de toutes ses forces au djinn qui habite la victime et lui demande de sortir tout de suite de son corps. La malade pleure, hurle de douleur, tremble de tous ses membres et sa voix est déjà celle de quelqu'un d'autre.
Appât du gain facile, il était clair que la science du raqui allait être vite déviée de sa fonction principale et dépouillée de son sens qui est celui d'aider les autres. A charge aux autres de rétribuer ou non le raqui par le salaire qu'ils voulaient bien lui donner.
Au Maroc par exemple, certaines séances de raqui coûtent très cher en plus des ingrédients rares sur le marché qu'il faut trouver. Selon un confrère de Médi1, certains produits peuvent coûter jusqu'à 3 000 dirhams et les séances sont généralement astreignantes.
Il n'empêche que la chaîne a eu le courage de sauter le pas et d'aller au fond des choses. Avec le consentement du raqui et de la famille du patient, Medi1 a ainsi réussi à transmettre une séance de désenvoûtement, sans rien couper, sans rien cacher aux spectateurs comme certaines images dites violentes et sans rien édulcorer non plus. Nous entendrons les cris de terreur d'un djinn qui selon le raqui habiterait la malade.
Cette patiente de 18 ans serait envoûtée et sa famille a préféré voiler son visage pour lui assurer un total anonymat. L'opération est plutôt brutale et sans temps mort. Le saint homme crie de toutes ses forces au djinn qui habite la victime et lui demande de sortir immédiatement de son corps. La malade pleure, hurle de douleur, tremble de tous ses membres et sa voix est déjà celle de quelqu'un d'autre. Le raqui est imperturbable et ne lâche pas prise.
— Djinn, sors de cette femme, sors, c'est un ordre.
La jeune femme se débat entre en transe, puis pleure
— Je ne sortirai pas de ce corps, crie-t-elle.
— Qui es-tu, lui demande le raqui ?
— Un djinn
— Es-tu musulman ?
— Non je suis juif
— Sors de ce corps, qui ne t'appartient pas, répète encore le raqui, sans se laisser démonter par la folie furieuse qui s'est emparée brusquement de la jeune femme.
— Je ne sortirai pas
— Ce corps ne t'appartient pas, sors…
Au bout d'un moment et lassée par tant d'énergie dépensée en vain, la jeune femme se calme peu à peu et se laisse approcher par le raqui.
Il lui essuie alors son front couvert de sueur, applique la paume de sa main sur sa tête et récite quelques versets.
La jeune femme se relâche complètement et dans un râle, sombre dans un sommeil profond.
Mise en scène pour la télévision ou télévision réalité, une chose est sûre : après ce qu'on a vu dans ce reportage, on n'a plus envie d'avoir affaire aux djinns qu'ils soient juifs ou musulmans.
Qu’en pensent les psychiatres ?
Croyance - Les démons qui logeraient dans le corps des schizophrènes ne sont en fait, précisent-ils, que leurs démons intérieurs. Ils ne sont ni musulmans, ni chrétiens, ni athées.
Et que pensent les psychiatres de ces séances de désenvoûtement ? Y croient-ils ? Dans le cas contraire, quelles explications donnent-ils à ces pratiques qu'ils balaient généralement d'un revers de la main ?
Il faut reconnaître que Medi1 a fait preuve avec ce documentaire de beaucoup de professionnalisme et de maîtrise du sujet.
La chaîne a donné la parole à deux raquis, à des malades, à leurs familles, au public, à un sociologue et bien sûr à un médecin psychiatre.
Elle n'a pas tranché dans le sujet, n'a pris aucune position et s'est surtout contentée de rapprocher les points de vue pour aider à mieux appréhender le sujet. Tout le monde est tombé d'accord sur un point, y compris le psychiatre ; la roquia légale dite «chariia» doit être sauvegardée des manipulations des commerçants du temple. D'autant, soutiendra le praticien, que les malades atteints de schizophrénie ont tous les mêmes symptômes.
Se référant au documentaire visionné quelques minutes auparavant, il expliquera que la patiente qui se débattait et qui était au bord de la transe n'est, en fait, qu'une schizophrène du premier degré et que le djinn n'avait strictement rien à voir avec elle.
Le djinn, soutiendra-t-il, est une invention du faux raqui pour mettre en valeur ses pouvoirs et ses compétences. Le psychiatre expliquera avec force détails que les mêmes symptômes en cas de schizophrénie sont observés chez tous les malades qui en sont atteints. Cela a été observé en clinique.
Les lèvres sont bleues comme vidées de leur sang, l'élocution est hachée, décousue, sans fil conducteur, les membres se raidissent et le patient devient, par moments, fou furieux et même violent.
Le discours qu'il débite n'a aucun sens, il est brouillon et reste l'expression d'un dérangement intérieur que le médecin doit identifier avec patience pour trouver la juste thérapie.
Les psychiatres parlent d'élément déclencheur, d'élément susceptible d'avoir provoqué de tels dégâts.
Les démons qui logeraient dans le corps des schizophrènes ne sont en fait, précisent-ils, que leurs démons intérieurs. Ils ne sont ni musulmans, ni chrétiens, ni athées.Ils sont leur mal et par conséquent la piste de leur guérison.
Seuls les raquis «chare'i» (légaux) sont en mesure, grâce à l'appui du Coran, de savoir si oui ou non le sujet est atteint par ce type de perturbation.
Lignes rouges
En matière de roquia comme en matière de fetwa, on n'a pas le droit de laisser faire n'importe quel charlatan. Les autorités du culte devraient dresser des lignes rouges bien visibles et bien en vue pour que les apprentis sorciers du dogme ne puissent prospérer en toute liberté.
Il y va de la santé morale et physique des musulmans.
Source Infosoir Imaad Zoheir
Le Pèlerin