La France évoque les "épouvantables massacres" de Sétif
L'ambassadeur de France en Algérie, Bernard Bajolet, a pour la première fois qualifié "d'épouvantables massacres" la répression des manifestations en faveur de l'indépendance algérienne le 8 mai 1945 à Sétif, Guelma et Kherrata.
L'ambassadeur de France en Algérie Bernard Bajolet a déclaré dimanche à Guelma (est) que le "temps de la dénégation" des massacres perpétrés par la colonisation en Algérie "est terminé".
M. Bajolet, qui s'exprimait devant les étudiants de l'Université du 8 mai 1945 à Guelma, a parlé des "épouvantables massacres" commis il y a 63 ans dans trois grandes villes de l'est algérien: Sétif, Guelma et Kherrata, durant la colonisation.
"Aussi durs que soient les faits, la France n'entend pas, n'entend plus, les occulter. La temps de la dénégation est terminé", a déclaré M. Bajolet.
"Le 8 mai 1945, alors que les Algériens fêtaient dans tout le pays, au côté des européens, la victoire sur le nazisme, à laquelle ils avaient pris une large part, d'épouvantables massacres ont eu lieu à Sétif, Guelma et Kherrata", a rappelé M. Bajolet.
Il a souligné "la très lourde responsabilité des autorités françaises de l'époque dans ce déchaînement de folie meurtrière (qui a fait) des milliers de victimes innocentes, presque toutes algériennes".
Selon les Algériens, cette répression, à laquelle avaient participé des milices de civils, aurait fait 45.000 victimes. Du côté français, le bilan oscillerait entre 1.500 et 8.000 morts.
C'est la première fois qu'un responsable français qualifie de "massacres" la répression par les autorités françaises des manifestations d'Algériens en faveur de l'indépendance, immédiatement après la fin de la seconde guerre mondiale.
Le prédécesseur de M. Bajolet, Hubert Colin de Verdière, avait qualifié cette répression de "tragédie inexcusable".
La déclaration de M. Bajolet intervient cinq mois après un discours du président Nicolas Sarkozy à l'Université de Constantine, dans lequel il avait évoqué "les fautes et les crimes du passé" colonial français en Algérie, qualifiés d'"impardonnables".
Ces massacres "ont fait insulte aux principes fondateur de la République français et marqué son histoire d'une tache indélébile, a souligné l'ambassaeur de France.
Il a ajouté que "condamner le système colonial n'est pas condamner les Français qui sont nés en Algérie" et appelé "les deux ennemis d'hier à porter plus haut un message d'entente de concorde et d'amitié".
"Pour que nos relations (algérois-françaises) soient pleinement apaisées, il faut que la mémoire soit partagée et que l'histoire soit écrite à deux (...) Il faut que les tabous sautent, des deux côtés, et que les vérités révélées fassent place aux faits avérés", a-t-il dit.
La question de la "repentance" de la France sur les "crimes" qui auraient été commis par le colonialisme en Algérie (1830-1962) empoisonne les relations entre les deux pays depuis 2005. Elle a empêché la signature d'un traité d'amitié voulu par les présidents Jacques Chirac et Bouteflika et auquel M. Sarkozy a renoncé.
M. Bajolet s'est rendu à Guelma à l'occasion de la signature d'une convention de coopération entre les Universités de Guelma, Biskra, Skikda et l'Université Marc Bloch de Strasbourg.
Le Pèlerin