Algérie – France - Petite disgression niçoise
Interrogé lors de la conférence de presse de clôture sur l’état des relations entre la France et l’Algérie, mises à mal ces derniers temps, Nicolas Sarkozy s’est dit « très sensible » à la présence de Abdelaziz Bouteflika, précisant qu’il l’avait lui-même appelé pour lui demander de participer au sommet de Nice.
« Mais les problèmes, qui peuvent exister entre la France et l’Algérie, ne sont pas des problèmes qui existent entre deux présidents à titre personnel. C’est une histoire compliquée, il y a beaucoup de souffrances et d’incompréhension », a-t-il estimé, avant d’ajouter : « Dire qu’il suffit que l’Algérie participe au sommet pour que tout s’éclaire dans la relation entre la France et l’Algérie, je ne serais pas aussi optimiste. » « Il faudra encore du temps. J’ai dû moi-même m’y résoudre », a-t-il encore ajouté. « Pour moi, la guerre d’Algérie, c’est une Histoire avec un grand H… De mon point de vue, sûrement, je vois les choses de façon moins passionnée. » Le président français cherche-t-il l’apaisement ? Est-ce une réponse à la décision du président Bouteflika qui, pour ne pas envenimer davantage les relations entre les deux pays, avait refusé de donner suite à la requête de parlementaires algériens au sujet de la promulgation d’une loi de criminalisation des méfaits de la colonisation ?
A bien comprendre le chef de l’Etat français, le fond du contentieux algéro-français est donc bel et bien le passif colonial. Les autorités algériennes ont toujours dit que le renouveau des relations algéro-françaises est fondé sur l’assainissement du passé colonial et de sa reconnaissance par l’Etat français. Le président Sarkozy ira-t-il jusque-là ? Peu probable. Il a déjà annoncé qu’il refusait toute repentance et renvoie la balle aux historiens. Faut-il ainsi comprendre que l’Etat français ne prendra aucune initiative dans le sens d’un endossement de ses responsabilités passées ? Certes, le travail des historiens est indispensable, voire fondamental, l’engagement de l’ancienne puissance coloniale dans la voie de l’apaisement et de la réconciliation ne l’est pas moins. Dans son discours du 7 février 2007 à Toulon, Nicolas Sarkozy, alors candidat à l’élection présidentielle, avait déjà annoncé la couleur en réhabilitant les poncifs les plus éculés relatifs aux bienfaits de la colonisation française.
Lorsque le président Sarkozy dit que l’histoire algéro-française est « une histoire compliquée », et qu’« il y a beaucoup de souffrances et d’incompréhension », ne renvoie-t-il pas dos à dos le colonisateur et le colonisé dans les souffrances endurées du fait du système colonial et de ses effets ? Certes, les souffrances sont réelles de part et d’autre, mais elles ne sont ni de même nature ni de même ampleur. Nicolas Sarkozy montre ainsi qu’il est réceptif et sensible à cette partie de l’opinion publique française qui entretient une mémoire sélective de la guerre d’Algérie et qui justifie les exactions et la répression coloniales par l’action armée du FLN.
Source El Watan Nadjia Bouzeghrane
Le Pèlerin