Sud algérien - Le couffin de Barkat
Depuis février dernier, Saïd Barkat, ministre de la Solidarité nationale, effectue une tournée dans le sud du pays. Ce soudain intérêt pour une région marginalisée aurait pu passer inaperçu tant il est vrai que les visites protocolaires des ministres n’intéressent plus personne, mis à part les invités aux dîners fastueux des walis. Mais la manière avec laquelle ce marathon est mené suscite déjà des questions. M. Barkat, qui gère un budget important, est allé à Adrar, Bordj Badji Mokhtar, Tamanrasset, Béchar, Ghardaïa, El Ménéa, Naâma, El Bayadh, Laghouat, El Oued. L’ex-ministre de l’Agriculture y a remis des produits alimentaires, promis des postes d’emploi aux jeunes, des aides aux femmes au foyer et des projets dans le cadre de l’opération Blanche Algérie de protection de l’environnement. Une opération aux résultats inconnus.
Les villes et villages algériens sont-ils plus propres depuis le lancement de Blanche Algérie en 2009 ?
Saïd Barkat, qui n’a toujours pas présenté le bilan détaillé du Programme de soutien aux agriculteurs (PNDRA), un plan qui a consommé des milliards de dinars sans que l’agriculture algérienne enregistre de meilleures performances, a parlé à Adrar de «programme national » pour soutenir «les familles nécessiteuses». Pourquoi ce «programme» n’a-t-il pas été mis en application auparavant ? A-t-on répertorié avec exactitude le nombre de «familles nécessiteuses» en Algérie ? Il est évident que les couffins de Saïd Barkat, qui ressemblent aux brioches de Marie Antoinette, n’ont été remplis qu’après les émeutes des jeunes, en janvier dernier, et la poursuite des contestations sociales dans tous les secteurs depuis cette date. Situation entretenue par le mouvement évolutif des révoltes arabes qui fait reculer chaque jour, voire chaque heure, les barrières de la peur.
Le but est de tenter de calmer les esprits, d’acheter «la paix» et de s’assurer le confort de «la docilité» par le sac de semoule et les microbus. Une attitude «royaliste», hautaine et sans finesse. L’Algérien est réduit à un tube digestif et à un mineur qui a besoin «d’assistance». Les appels des chômeurs et des populations appauvries du Sud n’ont jamais été entendus à El Mouradia ou ailleurs. On a fait semblant, pour un temps, d’y prêter attention. Sans plus. M. Barkat fait du bruit dans les contrées du Sud pour faire oublier les silences indécents des palais d’Alger. Daho Ould Kablia, ministre de l’Intérieur, a reçu dernièrement «les notables» du Sud – qui ne représentent pas la population – pour dire que l’Etat «prend en charge» les problèmes des gens du Sahara. Un discours qui ne fait plus recette. Ould Kablia ou Barkat se sont-ils souciés des billets de banque qui manquent dans les bureaux de poste du Sud et même du Nord ? Les gens du Hoggar, du Gourrara, de la Saoura, du M’zab et des Ziban savent depuis longtemps que les vents de sable ne tuent pas et que les promesses du Nord ne remplissent pas les puits d’eau.
Source El Watan Fayçal Métaoui
Le Pèlerin