Une équation difficilement soluble dans la laïcité
La France peine à résoudre, dans le respect de la loi sur la laïcité, l'équation de la formation de imams et doit composer avec certains religieux autoproclamés et à la culture sommaire ou avec d'autres venus de pays où politique et religion sont entremêlées.
Ce double souci de lutter contre l'extrémisme et de soustraire les fidèles à l'influence des bailleurs de fonds maghrébins, turcs ou saoudiens a engendré le voeu d'un "islam de France" adapté au contexte hexagonal, dans lequel les imams vont aussi transmettre les valeurs comme le respect de la loi, la liberté de conscience ou l'égalité entre les sexes.
Sauf que venant de l'Algérie où l'islam est religion d'Etat, du Maroc où le roi est le commandeur des croyants, deux pays où le Coran est aussi source de législation, ces religieux au statut de fonctionnaire n'ont pas été préparés à officier dans les 2.000 mosquées et salles de prière de France où les croyances sont une affaire personnelle.
Sans compter qu'un certain nombre d'entre eux ne parlent même pas le français pour pouvoir s'adresser aux jeunes musulmans nés en France. Sur les 1.200 imams en exercice, moins de 200 ont le niveau de la fonction, selon la Grande mosquée de Paris (GMP) qui forme ses propres imams.
Les imams "autoproclamés" (l'islam n'a pas de corps clérical), bénévoles ou rémunérés par l'aumône des fidèles, ont juste une certaine connaissance de la langue arabe qui leur permet l'accès au texte.
Mais de l'islam, ils ont une connaissance sommaire et en donnent une "image caricaturale" qui favorise l'intégrisme, selon le président d'une association musulmane parisienne qui a requis l'anonymat.
"Je souhaite qu'il y ait en France un institut de formation des imams de France, qui parlent français, qui connaissent notre culture et qui respectent nos coutumes", avait souhaité Nicolas Sarkozy en 2003 alors qu'il était ministre de l'Intérieur. Un souhait rappelé par Claude Guéant qui s'est rendu lundi à la Grande mosquée de Paris.
En 2008, l'Institut Catholique a signé une convention avec cette mosquée pour compléter la formation des imams par un cycle de deux ans, financé en partie par l'Etat et proposé sous le libellé "Religions, laïcité, interculturalité".
"C'est un dispositif précis destiné à sensibiliser un certain nombre d'acteurs religieux aux particularités du régime de laïcité, aux grandes dates de l'histoire de France et à la pluralité religieuse", commente le chercheur Franck Frégosi.
Cet expert, auteur de "penser l'islam dans la laïcité", observe que le cycle est "fréquenté par le courant franco-algérien qui s'est montré très docile vis à vis des autorités françaises" mais qu'il est rejeté par "d'autres composantes de l'islam gênées que la formation soient dispensée par la Catho".
L'initiative a éveillé la méfiance de l'Union des organisations islamiques de France (UOIF, réputée proche des Frères musulman) et qui forme depuis 1992 ses propres imams à Saint-Léger-de-Fougeret, au coeur de la Nièvre.
Un projet d'institut d'études islamiques à l'université a par ailleurs été refusé par La Sorbonne.
Le commissaire à la diversité, Yazid Sabeg, plaide pour une formation là où les lois concordataires pourraient permettre à l'Etat de financer un tel projet, comme à Strasbourg où sont implantés une université catholique et une protestante qui délivrent un diplôme d'Etat. La GMP serait alors une "autorité certificatrice".
Source MSN AFP
Le Pèlerin